Le Forfait tout inclus serait-il bienvenu en Haïti?de Ronald Estrade| JobPaw.com

Le Forfait tout inclus serait-il bienvenu en Haïti?


L’existence des entreprises concurrentes permet entre autre d’évaluer ses forces, ses faiblesses et la qualité de son service à la clientèle. C’est le cas actuellement pour des pays comme la République Dominicaine, le Mexique, Cuba, Jamaïque etc. qui sont situés en Amérique Centrale et qui sont en compétition avec Haïti au niveau touristique. Comme la rivalité n’est pas très féroce dans plusieurs domaines en Haïti, il en découle un service de qualité moindre. Ainsi je me demande si l’arrivée d’un Forfait Tout Inclus (FTI) ne revigorerait pas le secteur touristique haïtien. Les FTI constituent un bon moyen pour augmenter la croissance économique d’un pays ou d’une entreprise. Il suffit de réaliser que la réussite d’un séjour est un travail d’équipe et il faut à juste titre le souligner. Dans ce secteur d’activité comme dans beaucoup d’autres, la réussite dépend de la capacité d’un groupe d’individus à réaliser leur interdépendance pour faciliter la réussite du réseau.
Le Forfait tout inclus serait-il bienvenu en Haïti?

En Haïti, nous cultivons la différence. Elle se véhicule de nombreuses manières et spécialement à travers nos standards nationaux qui sont parfois loin de ceux reconnus au niveau international. Cette culture de la différence n’est pas souvent remise en question à cause du grand amour des Haïtiens pour leur pays et par leur besoin de faire des affaires dans leurs cercles familiaux (mariages, décès etc.). Au niveau des étrangers, on aime ou on déteste ce pays et tout ce qui l’entoure. Mais la question de la satisfaction de la clientèle n’est pas souvent posée. Dans le cadre d’un contrat professionnel, je me suis rendu avec d’autres experts au Cap-Haitien en passant par ma ville natale Port-au-Prince. Le service dans l’ensemble était de piètre qualité mais il faut beaucoup d’événements fâcheux pour me décourager. Comme je suis un éternel optimiste, par souci d’objectivité, je me suis lancé dans un mini sondage parmi les passagers qui prenaient l’avion avec moi à destination du Cap. Ainsi, j’ai eu la preuve non scientifique que le service à la clientèle dispensé à la clientèle de l’industrie hôtelière et aux voyageurs de l’aéroport international de Toussaint Louverture durant cette période était très bas par rapport au minimum reconnu internationalement. Mais comme il n’y a pas officiellement un endroit pour se plaindre (celui qui ne va pas se plaindre ne réagira pas tout de suite mais il va parler de ses mésaventures à au moins 10 de ses connaissances), suite au sondage, on a ri de gaieté de cœur avant de nous rendre à notre prochaine destination.

Pour s’apprécier à sa juste valeur, il faut se comparer par rapport à des acteurs qui vivent des réalités proches comme la région géographique ou la situation socioéconomique. Ainsi la région caribéenne est une gauge adéquate pour comparer nos services en Haïti. Car contrairement à la pensée populaire, les compétences de mes compatriotes dans le service à la clientèle sont parfois reconnues au niveau international. On peut citer en exemple le cas d’American Airlines qui désert la capitale haïtienne depuis 1971 avec actuellement 140 employés en «fonction en Haïti» (HL, 2011). Donc si quarante ans plus tard, la compagnie dessert encore notre pays, c’est qu’elle croit au professionnalisme de ses employés et que son service à la clientèle est rentable.

Comme j’enseigne dans l’éducation postsecondaire en formation professionnelle et que je relie souvent la formation et le monde du travail. Je fais souvent le lien dans mes voyages entre les réalités du «Milieu de Travail» et les programmes de la formation professionnelle. Dans ce contexte, la compétence «Service à la clientèle» présente dans plusieurs programmes doit permettre d’adopter un comportement adéquat (respect des principes ou des règles de conduite et la transmission d’informations pertinentes), de personnaliser son service et de gérer le stress inhérent au contact d’un public. L’existence des entreprises concurrentes permet entre autre d’évaluer ses forces, ses faiblesses et la qualité de son service à la clientèle. C’est le cas actuellement pour des pays comme la République Dominicaine, le Mexique, Cuba, Jamaïque etc. qui sont situés en Amérique Centrale et qui sont en compétition avec Haïti au niveau touristique. Comme la rivalité n’est pas très féroce dans plusieurs domaines en Haïti, il en découle un service de qualité moindre. Ainsi je me demande si l’arrivée d’un Forfait Tout Inclus (FTI) ne revigorerait pas le secteur touristique haïtien. D’après mes renseignements, il y a eu 15 ans de cela des FTI pour une courte période dans le pays. Mais cela n’a pas duré faute d’un bassin suffisant de clients. De plus, le service de transport aérien perd aussi de la concurrence ce qui est néfaste pour la clientèle. L’une des compagnies qui s’est bien comporté en Haïti est Sunwing. Cette compagnie offrait des voyages à bas prix à destination de Port-au-Prince les mercredis avec du champagne, un repas chaud et une allocation de bagage de 45 kilos (Communiqué de presse de Sunwing du 28 avril 2009). Ce qui est très adéquat compte tenu de la qualité du service offert par les autres compagnies aérienne à destination de Port-au-Prince. Mais malheureusement pour nous Sunwing a arrêté son service en Haïti depuis janvier 2010.

Étant donné que c’était la semaine de relâche au Québec, que ma femme et moi évoluons dans le secteur de l’éducation, nous revenons d’un FTI au Mexique et nous en sommes très satisfaits. J’ai fait affaires avec l’agent Yvonne des Voyages Forfait Plus de Montréal qui m’a procuré le «Sunwing Forfait Riu Lupita Tout Inclus» pour moins de 2500 dollars canadien. À cette occasion, nous avons eu nos deux vol, un transport de l’aéroport à l’hôtel (et vice-versa), un hôtel style familial avec un personnel bien formé au service à la clientèle composé de 150 personnes (évoluant dans 7 départements allant des préposés aux services de chambre aux animateurs culturels) qui nous ont permis d’être très heureux parmi eux et de passer de bonnes vacances comme tous les autres couples. Au fait, ma satisfaction était si grande que je me suis fait un devoir de contacter la directrice adjointe (traduction libre de Subdirectora : sous-directrice) et Yvonne pour leur faire part de mon état d’âme. Comme ma femme et moi somme dans la quarantaine et que les enfants sont grands, nous faisons partie des clients fidèles des FTI. Ainsi je serais très heureux si les RIU Hotels & Resorts ou les autres consortiums hôteliers internationaux (Blau, Sol Melia, Mercure, Barcelo, etc.) construisaient leurs prochains hôtels en Haïti. Au fait, je serais parmi les 30% des clients qui reviendraient au complexe d’Haïti régulièrement et je ferais le nécessaire pour former leur personnel via Fetpaw (www.fetpaw.com) car j’aime beaucoup mon pays. Après tout les RIU sont présents dans la République Dominicaine voisine, au Mexique, au Bahamas, en Jamaïque, à Panama, au Costa Rica (Site web de la compagnie). Au fait, nous avons des plages magnifiques et d’autres sites naturels extraordinaires (étang, grotte, corail etc.) qui ne demandent qu’à être exploité et apprécié par les touristes du monde entier.

Les FTI constituent un bon moyen pour augmenter la croissance économique d’un pays ou d’une entreprise. Il suffit de réaliser que la réussite d’un séjour (comme le mien) est un travail d’équipe et il faut à juste titre le souligner. Dans ce secteur d’activité comme dans beaucoup d’autres, la réussite dépend de la capacité d’un groupe d’individus à réaliser leur interdépendance pour faciliter la réussite du projet. D’où l’impact de la mentalité sur un secteur aussi fragile que le tourisme haïtien (ignorance par rapport à la nouvelle réalité des technologies et de la mobilité des personnes – éthique professionnelle : choix des personnes selon leur compétence et non par favoritisme / planification du long terme versus le présent non satisfaisant). Pour comprendre l’absence du tourisme en Haïti, il faut également souligner l’affreuse première impression que procure notre aéroport international Toussaint-Louverture (Guy, 2011). Mais aussi la nonchalance pour ne pas dire l’absence d’action de plusieurs intervenants majeurs dans le tourisme haïtien. Comme les FTI ne réussissent pas toujours et que mon séjour a été agréable au Mexique, je voudrais passer en revue, les membres du réseau qui ont bien joué leur rôle et voir comment on pourrait faire la même chose en Haïti. Ce sont le gouvernement mexicain, le grossiste en voyage, l’agent de voyage, le service aéroportuaire et le système de transport et finalement l’infrastructure hôtellerie.

Tout d’abord, il faut souligner la collaboration du gouvernement mexicain. Il n’a pas seulement déclaré que les produits culturels, l’hôtellerie et l’artisanat sont des secteurs prioritaires mais il a établi les bases de leur subsistance. Malgré les problèmes soulevés par le trafic de la drogue, la violence et la pauvreté. Le gouvernement mexicain offre la stabilité politique, un climat de sécurité dans les régions touristiques, un minimum de qualité dans le système scolaire, un encouragement des travailleurs par la subvention de logements sociaux etc. Tout ceci permet aux employés du secteur de l’hôtellerie une stabilité professionnelle.

Ensuite, il faut souligner l’impact des grossistes en voyage sur la terre des Maya. Au Canada, les grossistes en voyage offrent des Destinations Soleil, des Destinations Européennes, des Aubaines de Dernière minute etc. Un grossiste est généralement un intermédiaire entre le producteur de service (hôtel, compagnie aérienne, service de taxi) et le détaillant (mon agence de voyage). Le grossiste en voyage achète en gros un certain nombre de chambres et de vols pour l’année (ce qui lui permet d’avoir un prix alléchant). C’est pourquoi, il peut m’offrir en des périodes de pointes (été, semaine de relâche, carnaval), à des occasions spéciales (mariages, lune de miel, etc.), pour des raisons diverses comme les sports de prédilection (golf) ou de détente (spa) des FTI. Un grossiste n’est rien de moins qu’un entrepreneur avec sa Petite et Moyenne Entreprise (PME). Et son impact est primordial pour l’économie d’un pays que ce soit au Canada ou en Haïti:

Dans notre économie, les petites et moyennes entreprises (PME) occupent une place de choix. Par exemple, un rapport récent du Ministère du Développement Économique, de l'Exportation et de l'Innovation (MDEIE, 2006) estimait qu'en 2003 : 70,3% des entreprises québécoises procuraient du travail à moins de 5 employés, 19,5% employaient entre 5 et 19 personnes, 5,8% entre 20 et 50 et 3,2% entre 50 et 200, assurant, dans la foulée, un peu plus de la moitié (54,1%) des emplois pour l'ensemble des secteurs d'activité (Cadieux et Brouard, 2009, p. 1).

Mon grossiste de Vacances fait l’affaire des agents de voyages et l’ensemble de la population qui désirent un voyage où le meilleur rapport qualité prix est à l’honneur. En Haïti les grossistes n’offrent pas les Forfaits tout inclus car ils estiment que ce service n’est pas rentable ou qu’ils ne veulent pas prendre le risque de le développer. Car la création d’un forfait demande de l’effort, du temps et de l’argent.

Le troisième élément à souligner est l’agent de voyage qui m’offre un service courtois et de bonne qualité. Ainsi, à peine arrivé, déjà ma femme et moi, préparons notre prochain voyage. Ce qui je l’espère ne fera pas diminuer le chiffre d’affaires de l’agence de Voyage.

Le quatrième élément à souligner est le service aéroportuaire et de transport terrestre. Suite à ma sortie de l’aéroport, où le service d’immigration a joué son rôle, on m’a offert des services spécialisés de taxi mais à aucun moyen je ne me suis senti ni agressé, ni imposé. Un agent du grossiste m’a indiqué par la suite le numéro de mon autobus et je me suis dirigé à destination. En chemin, un jeune mexicain a offert de m’aider. J’ai accepté son offre et par la suite je lui ai laissé un pourboire. À part sa reconnaissance, je n’ai pas eu de jugement et le chauffeur désigné s’est chargé de me ramené à l’hôtel.

À mon arrivé à l’hôtel tout était prêt d’avance et il ne me fallait que les signatures d’usage et des photocopies. Le personnel était courtois, respectueux et s’acquittait très bien de leur tâche.

Donc vous comprenez pourquoi j’aimerais voir naître dans mon pays d’origine un service de Forfait Tout Inclus dans la perspective de création d’emplois durable. Et cela pourra être un des leviers économiques dont le pays a besoin pour commencer à se développer.

En attendant mon prochain article, vous pouvez également vous poser les questions suivantes :
 Quels sont les raisons pour lesquelles les Forfaits Tout Inclus ne sont pas présentement offert en Haïti?

 Quel système conviendrait mieux pour l’insertion professionnelle à court terme du personnel affecté au tourisme haïtien: la formation professionnelle ou le compagnonnage?

À la prochaine réflexion.



BIBLIOGRAPHIE

HL (2011). Haïti - Voyages : American Airlines dessert Haïti depuis 40 ans ! Haïti Libre,
http://www.haitilibre.com/ (page consultée le 4 mars 2011)

Guy, C. (2011). Haïti : le pays sans touristes. La Presse, http://www.cyberpresse.ca/
(page consultée le 4 mars 2011)

L. Cadieux et F. Brouard (2009). La Transmission des PME : Perspectives et enjeux.
Québec : Les Presses de l'Université du Québec.

Site web Sunwing du communiqué de presse: http://www.sunwing.ca/fr/fr_newsstory.asp?id=163 (page consultée le 4 mars 2011).

Rubrique: Conseils Emploi
Auteur: Ronald Estrade | restrade@hotmail.com
Date: 9 Mars 2011
Liste complète des mémoires et travaux de recherche