Adultes en formation, cela vaut le coût!de Ronald Estrade| JobPaw.com

Adultes en formation, cela vaut le coût!


Les adultes en formation, veulent augmenter leurs aptitudes productives ou leurs compétences. Les spécialistes en ressources humaines l’appellent le capital humain. Cet atout est nécessaire pour la progression de toute société. Les adultes en formation s’investissent, s’informent et vérifient la valeur de diverses formations offertes et choisissent celles qui leur semblent les plus appropriées à leur besoins. Examinons ensemble les raisons qui poussent un adulte bien occupé à s'inscrire à des activités de formation.
Laisser son pays pour des nouveaux cieux n’est pas toujours aisé. Pour ma part, la partie la plus difficile à été l’impossibilité de me former pendant plus de dix ans. Malgré les devoirs et les contraintes budgétaires, les études ont l’avantage de nous stimuler personnellement et intellectuellement. Au fait, travaillant au sein des entreprises diverses au salaire minimum, dans des milieux peu attrayant, il m’arrivait souvent de composer des poèmes pour ma dulcinée pour ne pas perdre complètement la tête. En 1991, un an après la naissance de ma fille, j’ai eu une sérieuse discussion avec mon épouse. Ainsi, je suis retourné sur les bancs de l’école pour combler ma soif d’apprendre et partager avec mes camarades de classes les connaissances acquises dans mon nouvel environnement éducationnel. Toutefois, avec l’expérience des années, je réalise qu’on peut également évoluer avec des formations à distances, des formations de courtes durée ou des formations en entreprise. Guichard et Huteau, 2007, citant Becker (Human Capital. N.Y. Col., 1964) eurent à affirmer que «les individus comme les employeurs, investissent en formation dès lors qu'ils peuvent en espérer un bénéfice supérieur aux coûts engagés». C’est pourquoi, malgré le peu de temps libre dont je dispose, je suis devenu un adulte en formation.


Comme bien d'autres travailleurs, les adultes en formation, veulent augmenter leurs aptitudes productives ou leurs compétences, d’autres personnes l’appellent leur capital humain. Ils s’investissent, s’informent et vérifient la valeur de diverses formations offertes et choisissent celles qui leur semblent les plus appropriées à leur besoins. «La qualité d'une formation repose d'abord sur la qualité et la diversité des expériences acquises en cours d'apprentissage» (Couriault et Laverriere 1980, p. 42). Pour ma part, mon engagement vient de ma volonté de participer à la progression de ma communauté et spécialement afin de ne pas être un simple spectateur face au besoin criant de formation des jeunes adultes de mon pays natal. Après l'apprentissage de LaTeX comme outil pour la production de mon guide de création de microentreprise pour les jeunes diplômés haïtiens, la fin de mon cours de soudage spécialisée de 30 heures durant les samedis, me voilà maintenant dans un cours de mesure et instrumentation de 90 heures durant deux soirs de la semaine. Ces formations sur mesure me stimulent et me permettent d'actualiser mes compétences dans mon sphère d'activité.

Pour ma femme, la formation sur mesure la permet de s'évader un peu. Avec ses cours de peinture, de sculpture alimentaire et de décoration, elle embrasse d'autres sphères d'activités et se décroche un peu de sa routine quotidienne. Mes enfants quant à eux prennent des formations sur mesure spécialisées comme le brevet d’aptitude de cadet, le certificat d’opérateur maritime ou la formation pour former des dirigeants efficaces. Allant déjà à l'école la majeure partie de leur temps, ils veulent jouer un rôle actif dans la société en s’y préparant activement. Ils travaillent à temps partiel et suivent des formations de très courte durée. Quand ma mère était encore vivante, elle prenait des cours de lecture, d'écriture et d’informatique. Ces activités de formation étaient importantes à ses yeux et elles lui permettaient de passer sans problème à travers les rudes mois de l'hiver quand elle n'était pas en Haïti.

Comme vous pouvez le constater, ma famille adore des formations sur mesure. Je vous parle de ma famille mais en le faisant, je veux aussi toucher votre famille. Un poète français du 17ème siècle disait «Oh insensé qui croit que je ne suis pas toi» (HUGO). Quelque soit votre raison ou celle de votre famille, une formation sur mesure permet de développer le goût d'apprendre tout au long de sa vie dans les diverses sphères de notre existence. Fetpaw (http://www.fetpaw.com/) est une microentreprise qui évolue dans le milieu éducationnel haïtien. Cette petite entreprise offre actuellement des formations sur mesure pour les employés des entreprises, les enseignants des institutions scolaires et des particuliers. Outre le besoin d’être présent dans le milieu de travail haïtien, la petite entreprise vise à sensibiliser les travailleurs d’Haïti sur l’importance de la formation en générale et de la formation technique en particulier. «L’enseignement technique et professionnel reste celui dont l’accès est très limité en raison de la faiblesse de l’offre» (RH, 2004, p.19). Par exemple pour les travailleurs évoluant dans le secteur de la petite enfance, une formation sur «l’hygiène et salubrité alimentaires» est au point de vue de fetpaw essentielle au bien-être des enfants. Toutefois, une formation passe par la reconnaissance des acteurs du milieu et fetpaw pense qu’un service de formation et de l’éducation continue de qualité devrait être offert spécialement dans tous les pays en voie de développement. Et l’État devrait dans la limite de ses moyens donner l’indication des voies à prendre pour assurer une vraie formation à la vie professionnelle, gage d'efficacité économique, arme contre le chômage. Car «développer la qualité, c’est donc l’espérance de développer l’emploi» (Dalle et Bounine, 1993 p. 17). Et bien qu’elles soient peu nombreuses sur le marché du travail haïtien, les grandes entreprises comme la Brasserie Nationale, Charles Féquière, EEE, ECEM, Électricité d’Haïti, Elmeco, Elmecen, LEC, l’imprimerie Le Natal, Valerio Canez etc. devraient donner l’exemple et faire leur part en investissant au moins 1% de leur masse salariale dans la formation de leur personnel. Cela permettrait à ces entreprises d’avoir un département de formation efficace ou de confier cette dernière à un sous-traitant spécialisé. Car «une entreprise qui forme est nécessairement une entreprise qui se remet constamment en question: elle doit s'interroger sur la finalité de la moindre de ses initiatives. C'est une entreprise qui attache autant d'importance au professionnalisme des membres de son personnel chargés quotidiennement de prendre soin de ses clients, de ses machines et de ses produits qu'à celui de ses cadres. C'est une entreprise qui est nécessairement soucieuse de qualité, car le professionnalisme, c'est la qualité» (Dalle et Bounine, 1993 p. 15).

Pour les personnes âgées de plus de 30 ans comme moi, il est possible de perdre une partie de nos neurones après une décennie. Ainsi en stimulant notre cerveau nous pouvons peut peut-être réduire la vitesse d'apparition de la maladie d'Alzheimer. L'âge étant le principal facteur de risque de cette maladie (Amieva, Phillips, Della, 2003 cités par Bherer, Belleville et Hudon, 2004). Il est impératif de profiter de la mémoire à court terme, de notre cerveau pendant que nous sommes encore jeune. Au Québec où fetpaw est enregistrée, la semaine des adultes en formation est célébrée du 20 au 26 mars 2010 et «500 activités sont organisés pour l'occasion» (ICÉA, mars 2010 p. 3).

Quelles sont les raisons qui poussent un adulte à s'inscrire à des activités de formation?

Vous pouvez me dire qu'apprendre est une activité qui stimule le cerveau et que plusieurs pays dans le monde reconnaissent l'importance de l'apprentissage tout au long de la vie. Mais en Haïti, cela vaut-il la peine d'apprendre quand on a de la difficulté à combler les besoins les plus élémentaires de la vie comme se nourrir ou se vêtir? Étant nés dans un pays issus de l’esclavage, nous les haïtiens apprécions l’éducation et la formation. Car elles ne nous étaient pas accessibles avant l’indépendance de notre pays. Au moment de la colonie, les esclaves étaient considérés comme des biens corvéables à souhait. L’éducation n’était pas au menu et toute tentative d’apprentissage était punie par la flagellation ou l’amputation. À l’époque, le colon français, pour éduquer son enfant, devait l’envoyer en France. C’est pourquoi, il n’était pas nécessaire d’avoir des écoles en Haïti [Saint-Domingue] avant l’indépendance. Après l’indépendance, les écoles étaient dédiées à ceux qui en avaient les moyens. Cette manière d’agir et de penser est encore dans nos mœurs et elle est difficile à désenraciner (République d’Haïti, 2007).

«Ce n’est que vers les années 1870 que l’école a commencé à se libéraliser timidement. Malgré tout, ceux qui avaient la chance d’y avoir accès se considéraient comme différents des autres. C’est une minorité qui avait accès à l’école… La grande demande scolaire a éclaté véritablement vers les années 1970, suite à différents facteurs tel que l’intensification de l’exode rural et l’immigration à l’étranger. Il se trouve que d’une part, l’État n’arrivait pas à construire suffisamment d’écoles pour faire face à cette demande, d’autre part, les écoles disponibles n’avaient pas suffisamment de places et se trouvaient isolées sans un véritable contrôle. Les maîtres n’étant pas adéquatement préparés à leurs tâches, il s’en est suivi soit un massif abandon scolaire après 2 ou 3 années de classes, soit une éducation au rabais» (Ibid., p. 5 et 6).

Il n'existe pas d'obstacles majeurs pour les adultes qui veulent apprendre. Regardez autour de vous et examinez ceux qui sont impliqués dans des activités de formation. Que ce soit la formation à distance, la formation en entreprise, la formation sur mesure, le compagnonnage, le mentorat etc. Ils ont tous un cheminement hors du commun. Ils savent que le cerveau est un muscle et que l'apprentissage régulier lui est vital. De plus, ils savent qu’en identifiant leur mode d'apprentissage et leurs besoins de formation, cela leur permet de rapprocher leurs rêves de la réalité.

Quant à moi, mon rêve le plus cher a toujours été de contribuer au bien-être de mon pays natal. Comme j'ai évolué dans l'enseignement technique, je me suis dit qu'il me fallait développer cette sphère d'activité. Au moment où vous lisez ces lignes, bien des adultes sont sous des tentes en attendant anxieusement ce que leur réserve l'avenir. Si tel n'est pas votre cas, vous pouvez contribuer à leur bien-être, en faisant le nécessaire pour que quelques uns d'entre eux aient accès à des livres de lecture, de bricolage ou autre qui vous sont chers, car la lecture est une thérapie.

Au niveau de la formation, plusieurs personnes évoquent leur manque de temps, leur manque de moyens, leur niveau intellectuel etc. pour éviter d'élaborer un projet de formation. Mais dans un pays aussi dévasté qu'Haïti, la formation est la voie royale pour améliorer ses perspectives de carrières, occuper ses temps libres, élargir ses horizons, augmenter son niveau de confiance personnelle et professionnelle, favoriser des rencontres professionnelles de qualité et relever de nouveaux défis.

Avant le séisme du 12 janvier 2010, malgré le coût de la scolarisation des enfants, les familles haïtiennes utilisaient leur maigre ressource financière pour envoyer leurs enfants à l'école. Avec la possibilité d'un changement au niveau du système éducatif en général, il est normal d'espérer que l'État et les organismes qui se chargeront de ce dossier vont contribuer plus activement dans le financement de l'éducation. Ce faisant la partie du budget familial qui était dédiée à l'instruction des enfants, sera désormais dédiée à la formation sur mesure des adultes. On pourrait du même coup, donner un crédit d'impôt pour la formation. Cela vaut le coût!



Bibliographie

Bherer, L., Belleville S. et Hudon, C. (2004). Psychologie & NeuroPsychiatrie du Vieillissement.
http://www.john-libbey-eurotext.fr/e-docs/00/04/0E/24/vers_alt/VersionPDF.pdf
Couriault, J-P. & Laverriere, J. (1980) Le stage pré-professionnel pédagogie et organisation. Les éditions d'organisation, Paris.


Guichard, J. & Huteau, M. (2007) Orientation et insertion professionnelle 75 concepts clés. Éditeur: Dunod, Paris.

Hugo, V. (1856). Les Contemplations, Tome 1. Éditeur W. Gerhard.

ICÉA (2010). Cahier publicitaire de l'ICÉA, mars 2010 p. 3

République d’Haïti, Ministère de l’Éducation Nationale, de la jeunesse et des sports (2004). Le développement de l'éducation, Rapport national d'Haïti. p. 19
Dalle, F. & Bounine, J. (1993) L'éducation en entreprise Contre le chômage des jeunes. Les éditions Odile Jacob, Paris.
République d’Haïti, Secrétairerie d'état à l'alphabétisation (2007). Projet de campagne nationale d'alphabétisation. p. 5 et 6


À bientôt,

Rubrique: Education
Auteur: Ronald Estrade | restrade@hotmail.com
Date: 1 Avril 2010
Liste complète des mémoires et travaux de recherche