Salaire minimumde Fabrice Dugas| JobPaw.com

Salaire minimum


Incidences probables, sur les agrégats macroéconomiques, de la mise en application de la loi sur le salaire minimum en Haïti
Une analyse macroéconomique des impacts de la hausse du salaire minimum à 200 Gourdes.
Préparé par Katie Flore Fils-Aimé avec la collaboration et sous la direction de Fabrice G. Dugas dans le cadre des activités hebdomadaires du Club ECHO du CTPEA.
Kfa71@hotmail.com; KFA71@yahoo.fr (Katie Flore Fils-Aimé, étudiante en 2eme année au CTPEA).
fd64fr@yahoo.fr (Fabrice G. Dugas, étudiant en 4eme année option économie appliquée au CTPEA)
Présenté le samedi 13 juin 2009

Depuis quelques temps toute une série de débats enflammés autour de divers sujets de l’actualité nationale fait rage dans les medias. Que ce soit le vote en retard, soit au mois de mai, du budget de la république pour l’année fiscale 2008-2009, la crise au sein de l’UEH, la loi faisant passer le salaire minimum de 70 à 200 Gourdes, on peut dire que la société haïtienne en a vu et continu de voir, de toutes les couleurs en l’espace de ces deux derniers mois. Cependant tous ces faits d’actualités précités ont un dénominateur commun qui est la loi sur le salaire minimum. C’est un sujet qui fait des opposants dans le sénat de la république, envenime la traditionnelle lutte entre patrons et salariés. Ainsi au regard de l’évolution et de l’ampleur de la question il serait important d’en attribuer un visage autre que le visage politique. A ce stade il s’impose un regard économique, plus précisément macroéconomique, sur la question afin d’analyser les incidences de l’application d’une telle loi sur les principaux agrégats macroéconomiques ?
Le député de Pétion-Ville, Steven Benoît qui est l’instigateur de ce fameux projet de loi ne mâche pas ses mots en ce qui concerne l’application de ladite loi, qui, selon lui, doit être en mesure de favoriser la masse des travailleurs industriels et commerciaux en particuliers, les secteurs industriel et commercial étant visiblement les plus concernés par l’exploitation ouvrière.
L’application d’une telle loi, considérant certains facteurs économiques, sociaux et politiques pour la plupart très déterminants dans la conjoncture ne saurait être sans conséquences considérables et notables.
En effet du côté des salariés, l’application de cette loi ne serait perçue comme rien d’autre qu’une bénédiction, un cadeau venu du ciel et du même coup elle (l’application de la loi) ferait augmenter la consommation des ménages et donc l’augmentation du revenu national. Cependant, le scénario serait nettement différent du côté des patrons et des décideurs politiques (le gouvernement plus précisément). Pour les patrons la conséquence immédiate serait une baisse, voir une chute de profit en supposant qu’ils se plient comme des enfants à l’application des 200 gourdes de salaires minima. Cependant la logique de la recherche de profit maximum fait que les entrepreneurs ne resteront pas sans rien faire, ainsi les cas de figures de riposte doivent être envisagés :
1- Soit ils procèdent à un licenciement proportionnel au niveau de l’augmentation du salaire minimum, ce qui leur permettrait de garder le même niveau de profit. Cette décision aura pour conséquence une augmentation du taux de chômage, qui viendrait aggraver le taux déjà élevé que connait notre économie.
2- Soit ils augmentent le prix des biens pour pallier à cette hausse de salaire. Cependant cette initiative est peu envisageable dans la mesure où la hausse des prix impliquerait une baisse de la demande, puis une baisse de leur chiffre d’affaire et enfin de leur profit.
Maintenant, quels sont donc les impacts de cette augmentation de salaire minimum sur l’économie en général ?
Si nous considérons le fait que la main d’oeuvre effective sur le marché du travail est relativement abondante, nous pouvons dire que, pour une augmentation de salaire donnée, même faible, nous pouvons nous attendre à une augmentation de l’offre sur le marché du travail plus que proportionnelle à l’augmentation du salaire.

Cependant, une augmentation de manière infinie du nombre de travailleurs sur le marché du travail peut être écartée dans la mesure où il y a l’emploi de soi par soi et que le marché du travail est un marché faiblement syndiqué et surtout non comptabilisé dans les livrets de l’état (Le fameux secteur informel)
Par contre, l’embauche aura tendance à augmenter plus que proportionnellement en réaction à une baisse de salaire mais quelque peu plus faiblement en termes absolus que la réaction de l’offre à une augmentation de salaire.
Si cette dernière (l’augmentation de salaire) n’améliore pas de façon significative le revenu réel du salaire à cause de la montée générale des prix, elle peut tout au moins empêcher sa détérioration.
Dans la conjoncture actuelle, la force de travail, étant abondante, a su mobiliser un support politique qui lui a permis une augmentation du salaire minimum mais malheureusement qui dépasse le salaire minimum d’équilibre c’est-à-dire celui qui garantit un taux d’inflation minimum.
L’économie haïtienne se trouve alors exposée à une augmentation du salaire déstabilisatrice. En plus d’être déstabilisatrice l’augmentation du salaire minimum est également source d’inflation en ce sens que l’augmentation de ce dernier va engendrer une hausse de la demande des biens de consommation qui par la suite provoquera une hausse des prix (selon la loi de l’offre et de la demande). La loi sur l’augmentation du salaire minimum parait être floue car elle ne semble pas prendre en considération la hausse des salaires dans l’administration publique, le secteur des services, de manière brève, cette loi semble tenir compte uniquement des salariés de l’industrie, ce qui parait être une aberration car l’économie ne comprend pas seulement l’industrie comme secteur. De plus, les salaires sont tous connectés, indépendamment du secteur d’activité.
La macroéconomie met alors à la disposition des décideurs politiques et économiques l’outil de contre déstabilisation qui est l’expansion de la masse monétaire accompagnée d’une politique fiscale appropriée. Evidemment, cette double politique fiscale et monétaire doit être étudiée avec le plus grand soin afin d’en déterminer le dosage approprié.
Il est cependant important de considérer que le recours à l’expansion monétaire est risqué et compte tenu de la conjoncture, peut entrainer une déstabilisation beaucoup plus grave que celle que pourrait entrainer l’augmentation du salaire minimum. En effet, elle est susceptible d’entrainer l’inflation par une répercussion sur le prix de la devise étrangère. De plus, cette expansion peut entrainer l’économie dans une spirale inflationniste pour diverses raisons ;
1) L’économie haïtienne est actuellement en situation de stagflation caractérisée par le sous emploi des ressources généralisées.
2) l’économie subit la pression des réajustements des revenus réels.
3) L’économie haïtienne totalement ouverte sur l’extérieur, ne contrôle le déficit de sa balance des paiements que par le freinage de l’activité économique, étant incapable

d’amorcer un quelconque processus durable de l’augmentation de sa production nationale à cause d’infrastructures archaïques, inefficiente et inefficace. Elle est ainsi incapable d’exploiter ses avantages comparatifs pourtant si nombreux et potentiellement porteurs de très grandes richesses à l’instar du secteur du tourisme.
Fort de cela, il serait donc nécessaire que nos macro économistes et nos statisticiens établissent une estimation du salaire minimum d’équilibre qui serait utilisée comme indicateur d’ajustement du salaire minimum en attendant que l’augmentation de la production nationale vienne éventuellement garantir cet équilibre sans qu’il n’en résulte une déstabilisation de l’économie. Il serait également nécessaire qu’on arrête de faire de la politique autour d’une question qui mérite avant tout une réponse, une attention économico-sociale.
Rubrique: Economie
Auteur: Fabrice Dugas | fd64fr@yahoo.fr
Date: 1 Juil 2009
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