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Lien école-communauté


L'école: un milieu de vie d'apprentissage à proximité et en interaction avec toute la communauté.
L’ÉCOLE :
UN MILIEU DE VIE D’APPRENTISSAGE
À PROXIMITÉ ET EN INT ERACTION AVEC TOUTE LA COMMUNAUTÉ

Micheline Raymond M. Éth. Sp. C

Mars 2009

Sommaire

PARTIE 1.- L’école : une communauté éducative et d’apprentissage 3
L’émergence du lien école-communauté 3
Les dimensions du rapprochement 4
L’organisation du lien école-communauté 5
La pérénnité des liens 9
Trois types de modèles d’écoles en partenariat 10
Les défis du développement de l’école en partenariat 11


PARTIE 2.- Rapprocher les familles de l’école 14
La nature de l’engagement parental dans l’école 14
Les domaines de collaboration entre la famille et l’école 16

Partie 1.- L’école : une communauté éducative
et d’apprentissage

L’émergence du lien école-communauté :

Une communauté est constituée de personnes issues du milieu scolaire, du secteur municipal, du milieu des affaires, d’organismes religieux et socio-communautaires et de simples citoyens. C’est un tissu vivant en perpétuelle évolution. Les différents acteurs qui la composent peuvent se rapprocher pour faire face ensemble aux changements inéluctables qui se présentent. Ce rapprochement peut se faire progressivement avec le temps ou de manière plus intensive et ponctuelle.

Les enjeux pouvant entraîner un rapprochement entre l’école et la communauté :

Les différents enjeux portés par les acteurs constituent les déclencheurs de l’action collective. Ils déterminent l’intérêt des acteurs pour la collaboration; ils développent aussi leur sentiment de l’urgence d’agir ensemble pour résoudre un problème. La portée de cette collaboration est donc conditionnée par la nature des enjeux. Trois types d’enjeux émergent principalement de toutes les expériences de rapprochement école-communauté :

• Les enjeux administratifs sont principalement d’ordre financier et visent la bonne gestion des ressources et des biens de chacun;
• Les enjeux éducatifs portent, de façon exclusive, sur l’amélioration des services visant la réussite éducative des apprenants;
• À travers les enjeux sociaux, l’école se préoccupe en concertation avec les autres acteurs de la communauté, des problématiques qui concernent une population commune.

Selon le cas, un type d’enjeux prédomine et détermine la vision que les acteurs vont adopter dans le développement du partenariat. Deux types de visions, donc deux façons d’aborder les problèmes et les solutions se distinguent.

Ainsi, les acteurs qui vont adopter une vision corporative abordent le développement d’un partenariat dans la perspective de leurs propres objectifs et de leur environnement organisationnel. Par exemple, dans le cas de l’école, l’objectif est de mener à bien son projet éducatif.

Les acteurs dont la vision est développementale portent leur attention sur des problématiques concernant une population commune; ils partagent alors une même approche globale des problèmes à résoudre. Ces acteurs prennent en considération les interrelations entre les problèmes des populations de chacun et de la communauté dans son ensemble. Par exemple, une école entretien des liens avec des organismes de la santé et des services sociaux. Elle se préoccupe conjointement d’enjeux éducatifs et sociaux.

Les dimensions du rapprochement :

Plusieurs facteurs importants présentant des dimensions humaines, sociales, financières, matérielles et organisationnelles contribuent à préparer le terrain.

La dimension humaine :

Dans toute initiative de rapprochement école-communauté, une personne ou un petit groupe de personnes conçoivent des projets et en font la promotion. Ces personnes doivent posséder d’abord une légitimité au sein de l’organisation et avoir une certaine crédibilité auprès de leurs interlocuteurs. Si l’idée vient de la base, ces personnes doivent pouvoir influencer la haute direction pour que celle-ci s’approprie le projet et devienne ensuite un moteur de changement dans l’organisation.

Ainsi, l’organisation de la communauté qui accueille l’école est déterminante dans l’approche qui est a nôtre : approche qui est, pour l’essentielle, participative. La participation est aussi tributaire de la réponse qu’on donne aux vrais besoins des habitants.

• L’école est-elle une priorité pour cette communauté?
• Ces populations sont-elles conscientes des rôles que l’école peut jouer dans cette communauté ?

Il faut animer une école jouant un rôle capital dans le développement de la zone, voire de la
ville:
• Quel quartier ?
• Qui sont ses habitants, leurs niveaux économiques, la place de la religion, de la politique, de la tradition et leur ouverture à la modernité ?
• Quelles sont les structures qui existent dans cette partie de la ville?
• Comment fonctionnent-elles? Le niveau de participation des populations dans la zone...
• Quel est le mode de gestion et quelles retombées pour la communauté et pour les familles?

Voilà autant de questions qui fusent, se croisent, se frottent, interpellent les enseignants, les directions d’écoles, les responsables du MENFP et toutes les personnes impliquées dans l’apprentissage des enfants.

Les réseaux et la communication :

C’est par la communication que l’information s’échange, que la vision peut se développer, que les enjeux peuvent être expliqués et compris par les partenaires. Cette communication est influencée par les réseaux de relations qui sont activés ou nouvellement développés. Ces relations peuvent être de nature personnelle ou professionnelle. Le choix des partenaires relève souvent de relations existantes que l’on privilégie en fonction d’affinités avec certaines personnes ou de la contribution potentielle du partenaire. Plus une expérience de partenariat est positive, plus les chances de choisir de nouveau le même partenaire pour d’autres projets semblent grandes.

Les dimensions matérielles et financière :

La disponibilité d’espace pour l’offre de services et l’accès à un équipement apparaissent comme des facteurs essentiels de rapprochement entre l’école et la communauté. D’autres facteurs, reliés aux restrictions budgétaires des départements scolaires et des écoles, peuvent déterminer ce rapprochement, par exemple les ressources disponibles pour les services aux apprenants en difficultés d’apprentissage ou de conditions économiques plus précaires. Cette situation est d’ailleurs à l’origine de rapprochements entre le milieu scolaire et le réseau de la santé et des services sociaux.

L’organisation du lien école-communauté :

Les premières initiatives ont un impact direct sur la nature des relations et les ententes subséquentes. L’organisation des liens implique le partage des responsabilités et des tâches de même que la mise en forme d’une organisation minimale qui soutient la coordination des activités. Les formes de partenariat qui s’installent comportent toutes les particularités quant aux premières démarches entamées, aux ententes officielles et non officielles ainsi qu’aux moyens mis en œuvre pour la réalisation des objectifs communs. Diverses facettes de l’organisation du lien école-communauté sont présentées ci-après :



Un exemple d’initiative du département scolaire et de l’école

La direction de l’école X propose un thème scolaire prônant un rapprochement avec la communauté. La mise sur pied de ce projet peut être facilitée grâce au financement du MENFP. Cet apport financier et le statut de projet pilote donnent la possibilité au directeur de l’école et à la Direction départementale (directeur et inspecteurs) de planifier le projet sous la forme d’un centre communautaire axé sur l’apprentissage. Ce projet conçu par la direction de l’école X devra mobiliser toutes les parties prenantes pour être actualisé.

Un exemple d’initiative de la communauté

Le contexte de croissance démographique de la population locale et la sollicitation des dirigeants du village amènent l’école Y à s’ouvrir au milieu. La direction de l’école accueille dans l’école des organismes comme un mini centre de loisirs pour les jeunes et une petite librairie scolaire. Elle partage son équipement et ses locaux pour certaines activités de sport et certains loisirs municipaux. Le conseil municipal de ce village est à l’origine de la démarche et finance le projet d’agrandissement et d’aménagement.

Le rôle du milieu scolaire dans l’organisation des liens, l’orientation et la portée des premières démarches varie selon l’acteur scolaire principal. Lorsqu’une direction d’école prend l’initiative ou est sollicitée par le milieu, les liens qu’elle entretient avec les organismes de sa communauté paraissent correspondre de façon plus spécifique à la réalité locale et engendrer une démarche plus rapide de partenariat. Dans les cas où la Direction départementale s’engage initialement, les semblent plutôt d’ordre général et tendent à instaurer un cadre d’action à l’intérieur duquel la direction d’école pourra initier des partenariats avec le milieu. Le leadership proactif et la participation directe de la direction d’école est donc un facteur essentiel à l’organisation des projets de partenariat, autant que l’encadrement de l’encadrement de la Direction départementale.

De ces premières initiatives, différents types de relations émergent.

Les relations :

Les relations qui s’établissent entre l’école et la communauté dépendent largement de la nature du projet et des enjeux qui les rassemblent. Trois types de relations surgissent alors :

• Les relations d’usage;
• Les relations de complémentarité;
• Les relation de type politique et de développement.

Les enjeux administratifs génèrent des relation d’usage qui concernent le partage de biens matériels entre le MENFP et les partenaires. La relation d’usage comporte trois sous-types : partenariat, relation propriétaire-locataire et cohabitation.

• Dans une relation de partenariat, le MENFP négocie avec une autre partie pour que les apprenants puissent utiliser ses locaux et son équipement et qu’en retour la population de cette autre partie (ou partenaire) puisse utiliser les infrastructures scolaires.

• Dans une relation propriétaire-locataire, un organisme loue des locaux dans un bâtiment du MENFP pour ses propres besoins. À l’inverse, le MENFP peut aussi louer des espaces dans un bâtiment appartenant à un autre propriétaire.

• La cohabitation est une relation qui existe entre les occupants d’un même bâtiment, normalement le personnel de l’école, les apprenants et les organismes occupant les lieux. Ils acceptent de vivre ensemble, car ils partagent un but commun et expriment des besoins communs (difficultés financières, besoin d’appartenance à une communauté locale, etc.). Le milieu scolaire considère parfois la communauté comme le client, parfois comme un «voisin» et l’école agit comme structure d’accueil.

Les enjeux éducatifs engendrent des relations de complémentarité. Ces relations donnent lieu à des échanges qui permettent de confronter des approches mises en œuvre auprès des populations (enfants, jeunes, parents). Les collaborateurs ont un but commun même si leurs objectifs diffèrent. Chaque organisation possède son propre projet mais s’associe à d’autres pour «faire mieux». Le mode de concertation est valorisé.

Les relations de type politique et de co-développement sont issues d’enjeux sociaux.

• Les relations de type politique s’établissent entre les parents et les représentants de la Direction départementale du MENFP ainsi qu’entre les parents et la direction de l’école. Les cas de fermeture et de réouverture d’écoles sont un exemple concret de ces relations.

• Les relations de co-développement prennent place entre différents intervenants du milieu qui s’associent sans perdre de vue le développement de la communauté; ce qui dépasse l’unique perspective de l’éducation. L’école considère alors la revitalisation ou le développement de la communauté comme le déterminant principal du maintien ou du développement de l’ensemble des services éducatifs.

Les ententes :

Les relations entre partenaires quel que soit leur type, sont toujours régies par une forme d’entente écrite et signée par toutes les parties impliquées qui varie en fonction de la formalité et de la durée. En effet, les protocoles peuvent être officiels ou non-officiels, selon le degré de partage des ressources et des responsabilités et selon les règles de gouverne et de gestion définies entre les parties. De plus, elles peuvent être de courte, de moyenne ou de longue durée, tout dépendant du niveau d’engagement des parties.

Trois types d’ententes peuvent lier le milieu scolaire à ses partenaires : des ententes d’utilisation, des ententes de services et des ententes de type politique.

• Les ententes d’utilisation encadrent le partage d’équipement et de locaux. Ces ententes comportent généralement un engagement financier des parties et son gérées par le MENFP en raison de leur caractère juridique. Elles sont généralement bien structurées et prévoient un partage financier soit selon une superficie d’utilisation (dans le cas de locations) soit selon un prorata d’utilisation (dans le cas de partage d’équipement). Ces ententes comportent habituellement deux types d’engagement financier : un prix global et des critères pour les frais supplémentaires. Elles comprennent les locaux et l’équipement scolaire. Certaines ententes spécifient les heures d’utilisation pour chaque type d’équipement et chaque local ainsi que les rôles et les responsabilités de chaque partenaire. Les ententes d’utilisation ont généralement une durée assez longue (5 à 15 ans).

Un exemple d’entente d’utilisation :

L’école Z (du département scolaire du nord) héberge un point de services de Médecins sans Frontières. Cette entente existe depuis de nombreuses années. L’initiative citoyenne qui est à l’origine résulte de la constatation d’une carence concernant l’accès au soins de santé de base. Le partenariat avec le MENFP, qui régit la location des lieux, n’a pas d’abord été conclu dans le but d’intégrer des services aux apprenants et à la communauté. À l’époque, l’école Z avait des locaux vacants et le directeur de l’école avait mis en contact la Direction départementale du MENFP et la Direction de Médecins sans Frontières. Par la suite, l’entente a été signée.
• Les ententes de services sont également gérées par le MENFP mais impliquent peu d’engagements financiers. Il s’agit d’un partage d’expertises. On verra plutôt un échange gratuit de locaux et d’équipement avec l’offre de certains services, comme la présence à l’école de policiers, d’intervenants d’une ONG ou d’une organisation internationale (travailleurs sociaux, infirmiers, travailleurs communautaires).

Un exemple d’entente de services :

À l’école B (département du sud), les ententes de services avec le CRS datent de plus de dix ans. Ces services sont intégrés à différents égards et prennent souvent la forme de projets communs. Par exemple, les intervenants (encadreurs terrain, animateurs communautaires) se mobilisent et organisent des services en fonction de «projets» ou de «thèmes», tels la prévention VIH-SIDA, la cantine scolaire…

• Les ententes de type politique encadrent évidemment les relations politiques et sont plutôt officielles, voire légales et réglementaires. C’est le cas d’une politique de maintien ou de fermeture d’école. La formulation d’une telle politique devrait s’opérer dans le cadre d’une consultation de la population et permettre d’établir une entente entre les membres d’une communauté (élus et non-élus) et les instances administratives du MENFP.

Un exemple d’entente politique :

Le partenariat entre l’école C (département du nord-ouest) et la communauté locale date de quelques années. En 1993, le MENFP procède à la fermeture de l’école en raison de contraintes financières attribuées directement à la baisse de l’effectif. Quelques années plus tard, les parents présentent, avec l’appui de certains organismes du milieu, une pétition au MENFP pour la réouverture de leur école. La municipalité s’engage alors à une contribution financière pour la relance de l’école qui rouvre ses portent en 2000. Actuellement, il existe toujours une entente écrite entre la municipalité et le MENFP. Chacune des instances assume ses responsabilités financières. La présence d’un document écrit et co-signé entre les parties semble donc favoriser la bonne entente.

Enfin, il existe un autre type d’engagement, d’ordre éthique, entre les parties : les accords. Ceux-ci sont fondés sur une promesse d’engagement des interlocuteurs dans une action future. Par les accords, les parties se promettent une collaboration ou décident d’un lieu d’échange comme un comité ou une table de concertation à l’échelle locale ou départementale.

Un exemple d’accord :

Dans un petit village de province (tout près de Jacmel), l’école G intègre un réseau local de plus de 20 acteurs qui se concertent et s’attaquent de façon conjointe, à des problématiques jeunesse par l’entremise de différents comités de travail. Ce réseau se nomme la Table Jeunesse «Kreyol».

La pérennité des liens :

Que les ententes soient officielles ou non, il est essentiel qu’elles reposent sur de saines relations entre les acteurs et qu’elles maintiennent un mode d’adaptation au changement, quelles que soient les circonstances. Les trois conditions suivantes peuvent stabiliser les projets de partenariat, les ententes et les bonnes relations entre acteurs.

Renouveler une vision commune :

Il semble que plus l’enjeu est élevé, plus l’engagement est fort et plus le partenariat a des chances de réussite. Toutefois, advenant l’arrivée de nouveaux acteurs, ceux-ci doivent endosser la vision commune qui est portée par le partenariat en début de projet. Si le projet est relativement flexible, ils pourront alors renouveler la vision avec les autres partenaires en fonction des nouveaux enjeux qui se présentent. Cela semble se faire d’autant plus facilement que chaque organisation a entamé une transformation interne de façon à mieux s’adapter au nouveau mode de fonctionnement partenarial (par exemple : entraînement au travail d’équipe multidisciplinaire multi-sectoriel interne à chaque organisation).

Maintenir la communication et la confiance :

Le partenariat peut durer à condition que les personnes en place maintiennent un niveau élevé de communication transparente et de confiance. Dans certains cas, il est primordial d’élargir et de multiplier les échanges car la communication est essentielle pour un partenariat basé sur la confiance. Cela implique généralement de déterminer des lieux possibles d’échange comme des comités de travail ou des organismes de participation de parents (les APP, par exemple). Il n’est d’ailleurs par surprenant que plus les personnes «s’entendent bien», plus les projets de partenariat ont des chances de réussite. Les personnes étant enracinées dans le milieu peuvent accroître la communication et la confiance, car elles adoptent un ensemble de valeurs, d’attitudes et de comportements pouvant mieux s’arrimer avec la culture locale.

Prendre conscience des avantages que chacun tire du partenariat :

Pour s’investir dans une démarche collective, chacun des participants doit y trouver son compte. Pour assurer la pérennité du lien ainsi créé, ces avantages doivent s’avérer concrets, justes, équitables et profitables pour chacune des organisations et des personnes impliquées. De plus, ils doivent dépasser l’investissement en temps, en argent et en efforts que chacun doit fournir pour développer des solutions avec d’autres partenaires.
Dans le cas d’un partage de biens, les premiers avantages visés impliquent habituellement la réduction des coûts de fonctionnement et des investissements initiaux pour la construction ou la rénovation de l’équipement ou des locaux. Cela avantage évidemment les organisations tant scolaires que locales. Le partage des locaux au sein du bâtiment où est située l’école permet de créer un lieu commun significatif pour les apprenants, leurs familles et la communauté en général. Cette situation permet également de rapprocher certains services des apprenants et de leurs familles.

Les avantages reliés à l’échange de services touchent à la qualité des interventions auprès des apprenants, à la complémentarité des ressources mises à la disposition des apprenants et de leurs familles ainsi qu’à une plus grande facilité d’intervention. On anticipe une amélioration des interventions car les divers professionnels sont plus en mesure de coordonner leurs actions et chaque intervenant possède une meilleure information sur l’ensemble des problématiques de sa population.

Les activités d’échange et de concertation permettent aux partenaires de mieux comprendre l’ensemble des problématiques, d’acquérir une compréhension commune des enjeux de la communauté, de voir émerger des possibilités de partenariat, d’identifier et de mieux connaître les partenaires potentiels, de partager des projets et de développer une vision commune au regard de certains enjeux.

Trois modèles d’écoles en partenariat :

Trois modèles conceptuels permettent de situer les écoles selon la nature de la collaboration qu’elles développent avec la communauté. Par contre, il faut prendre en compte qu’il n’existe pas de modèle unique permettant de décrire l’ensemble des relations entre les acteurs et l’école. Malgré tout, les trois modèles conceptuels : l’école partagée, l’école élargie et l’école réseautée, tout en n’étant pas mutuellement exclusifs, permettent d’appréhender les expériences particulières d’écoles ayant établi un partenariat et même d’entrevoir le déplacement d’un modèle dominant à un autre, illustrant ainsi l’évolution de l’école vers un modèle de partenariat durable.

• L’école partagée est animée par une vision corporative et vise à répondre à des enjeux administratifs avant tout. Ces enjeux touchent à la fois le milieu scolaire et des organismes de la communauté. Les relations sont basées sur un partage de biens (équipement ou locaux) et reposent sur des ententes officielles de longue durée visant à définir les règles d’utilisation des biens et en vertu desquelles les partenaires s’engagent à une responsabilité matérielle, financière ou non. Dans ce cas, le milieu scolaire entretient des liens avec des organismes qui n’ont pas nécessairement l’éducation comme mission prioritaire.

• L’école élargie repose aussi sur une vision corporative mais, cette fois-ci, ce sont des enjeux éducatifs qui poussent le milieu scolaire à collaborer avec d’autres organisations. Ces enjeux reposent généralement sur les services pouvant faciliter la réussite éducative. Les relations sont basées sur un esprit de complémentarité des services. Les ententes, habituellement officielles et de courte ou de moyenne durée, portent sur les besoins à combler chez les apprenants et leurs familles. La contribution des parties, qui consiste principalement en un échange d’expertise (ressources humaines) peut s’accompagner d’un partage de biens visant à faciliter l’harmonisation des interventions.

• L’école réseautée est portée par une vision développementale répondant à des enjeux sociaux. L’école est partie prenante de l’action collective et le regroupement d’acteurs est vu comme un projet de la communauté. Le milieu scolaire et les organismes de la communauté s’y engagent de façon consensuelle, car le projet contribuera à leurs missions respectives. On y entretient des relations de type politique et de co-développement pouvant faciliter l’harmonisation des stratégies de chacun des partenaires.

Les écoles qui développent des partenariats sont, à l’image des communautés dans lesquelles elles évoluent, des tissus vivants et en constante évolution.

Les défis du développement de l’école en partenariat :

Plusieurs défis se dressent en ce qui a trait au développement de l’école en partenariat avec la communauté.

Le défi de l’ouverture du milieu scolaire à la communauté :

La capacité du milieu scolaire à s’ouvrir à la communauté dépend des personnes en place et de certaines conditions facilitantes. Tout d’abord, la vision préconisée par le MENFP, notamment par l’entremise de son plan stratégique, peut représenter une poussée significative en faveur de cette ouverture. De plus, la présence de directions d’écoles qui s’engagent à mettre en place une école ouverte à la communauté (existence et implication proactive d’APP) est un facteur déterminant. Toutefois, pour agir dans les différents milieux et acquérir un leadership nécessaire pour promouvoir des projets, ces personnes doivent posséder une confiance et une certaine crédibilité auprès des autres leaders locaux. Cette crédibilité s’acquiert par la réalisation de petits et de grands projets et nécessite du temps.

Le défi de la disponibilité des ressources humaines :

Dans les communautés locales où il existe un appauvrissement sur le plan social, économique et même culturel, et où parfois la population est en déclin, il s’avère difficile d’élargir la participation à plusieurs acteurs, car les ressources sociales ou matérielles sont plutôt rares. La capacité de la communauté à participer au projet scolaire peut alors s’en trouver affaiblie. Toutefois, devant cette problématique, l’école peut entreprendre des actions sur les leviers sociaux, humains et économiques de la communauté en proposant, par exemple, de nouveaux services aux apprenants et à la population (cantine scolaire, librairie, petit magasin d’articles scolaires, mini clinique de soins de santé pour les apprenants et leur famille).




Le défi de l’organisation et du partenariat :

Le développement du partenariat demande un important travail de coordination et représente un défi d’organisation dans lequel la bonne communication est un élément essentiel. Les relations de travail de même que le partage des rôles et des responsabilités nécessitent une ouverture d’esprit et une volonté réelle de collaborer. Pour soutenir et animer des relations et des négociations d’ententes, il faut y investir du temps et des efforts, c’est-à-dire multiplier les rencontres et les échanges.

Les défis de la gestion du partage des ressources matérielles :

Le partage de l’équipement et des infrastructures, particulièrement sur le plan de la reconnaissance et de la gestion des frais supplémentaires, peut être un sujet de tensions entre les différentes parties. La reconnaissance commune et l’application du principe d’utilisateur-payeur dans le partage des biens, plus particulièrement, constitue une bonne pratique pouvant pallier les controverses.

Le défi de la sécurité et du climat en général :

D’autres défis touchent des aspects de l’implantation et de la mise en activité e l’école en partenariat avec la communauté. Dans une école qui accueille différents partenaires, la sécurité et le climat général sont des dimensions importantes à considérer. Toutefois, il est possible de remédier aux embûches qui pourraient freiner l’accueil de partenaires dans l’école : règles de circulation qui permettent de vérifier et de minimiser les allées et les venues des apprenants et des membres extérieures, accès réduits ou interdits à certains endroits précis, surveillance humaine accrue (gardien de sécurité, professeurs responsables).

En somme, les défis illustrent des éléments à prendre en compte pour développer un partenariat avec la communauté. Certaines conditions ont été identifiées pour l’établissement de partenariats durables : partager des buts, être co-responsable à l’égard du projet commun, respecter les prérogatives et la mission de chacun, mettre en commun des ressources complémentaires.

Ainsi, il existe une variété de situations qui peuvent amener l’école à changer ses façons de faire et à entamer un processus de construction d’un partenariat avec la communauté. La dimension humaine est primordiale dans l’émergence et l’organisation des projets de partenariats.

Les enjeux de la communauté dans son ensemble varient selon les milieux. Ils déterminent la portée de la collaboration et des relations qui s’établiront par la suite. Certains éléments favorisent la durabilité des liens établis. Par exemple, les ententes semblent avoir plus de chances de réussite si le partenariat s’appuie sur une vision commune et sur une lecture partagée des enjeux. D’autre part, une structure souple qui s’adapte aux différents acteurs et aux missions de chacun facilite le développement de partenariats durables. La forme du lien école-communauté dépend des caractéristiques des apprenants et de la population locale mais aussi du dynamisme des acteurs de la communauté, dont l’école.

Il est important que les différents acteurs disposent de la flexibilité nécessaires pour apporter leurs couleurs locales en investissant les ressources pertinentes, dont leur créativité, pour relever les défis d’une école en partenariat en Haïti et pour développer de nouvelles initiatives.

Partie 2.- Rapprocher les familles et l’école

Tous les parents ont a cœur la réussite et bien-être de leurs enfants. Or, la réussite des apprenants est l’aboutissement d’un long processus d’expériences diverses qui vont de leur naissance à la fréquentation de l’école pour leur éducation. Elle est donc influencée par quantité d’acteurs qui jalonnent leur vie et leur cheminement scolaire : leur famille, leurs amis, leurs enseignants, le personnel de direction de l’école, les conseillers pédagogiques, diverses personnes de la communauté environnante.

La réussite des apprenants tant sur le plan des apprentissages scolaires que de la socialisation et de la qualification, est également le résultat de multiples facteurs auxquels tous les acteurs sont appelés à contribuer : le climat de la classe et de l’école, les relations entre le personnel enseignant et les apprenants, la motivation des apprenants relativement aux apprentissages visés dans le programme de formation, leur attitude envers l’école, leurs aspirations scolaires, le soutien de la communauté, et la collaboration entre l’école, la famille et la communauté, pour ne nommer que ceux-là.

Parmi tous ces facteurs, l’engagement des parents envers leurs enfants, tout au long du cheminement scolaire, est un élément indéniable de la réussite des jeunes. Plusieurs recherches démontrent que l’effet de l’engagement parental est durable et qu’il se répercute sur les attitudes et les comportements des jeunes à l’égard de l’école et du travail scolaire, sur leur persévérance, sur leurs résultats scolaires ainsi que sur leur développement global.

Pour favoriser l’engagement parental (particulièrement à l’école fondamentale), un des moyens les plus fructueux est le rapprochement, voire une collaboration étroite entre l’école et la famille. La collaboration entre l’école et les parents permet à l’école de mieux comprendre la situation des familles et de répondre à leurs besoins, s’alliant, entre autres avec la communauté. Les liens qu’établit l’école avec la communauté permettent d’accroître grandement l’efficacité et la complémentarité des actions entreprises par l’école. Les écoles pourraient saisir là l’occasion d’inscrire cette préoccupation dans leur projet éducatif et leur plan de réussite.

Cette préoccupation de rapprocher l’école, la famille et la communauté est, encore plus déterminante dans les milieux où les conditions sociales et économiques sont difficiles. Toutefois, plusieurs questions se posent alors dans les principaux milieux (écoles, familles, départements scolaires du MENFP, organismes communautaires, etc.) qui se préoccupent de la collaboration entre l’école et la famille. On s’interroge plus particulièrement sur la nature de l’engagement parental qui est souhaitable tout au long de l’école et sur les meilleures façons pour l’école de susciter l’engagement des parents et la collaboration entre l’école et la famille et, le cas échéant, avec les partenaires de la communauté.

La nature de l’engagement parental dans l’école :

L’engagement des parents passe par une présence à l’école et par d’autres formes de soutien à la maison. La collaboration des parents ne s’exerce pas seulement par leur présence à l’école. Elle peut aussi s’exprimer efficacement par d’autres formes de soutien à la maison (l’aide aux devoirs, par exemple). Il existe des formes d’engagement très variables que le personnel scolaire peut favoriser. Ainsi, les apprenants aiment parler de ce qu’ils font à l’école, non seulement avec leurs amis et leurs enseignants, mais aussi avec leurs parents. Ils sont souvent d’accord pour leur demander de les aider et ils apprécient que leurs parents les encouragent. Ces dimensions, souvent oubliées, sont essentielles; d’autant plus que dans bien des cas, les capacités des parents impliqués sont simultanément augmentées (bien des parents ont appris à lire, à écrire, à compter… en participant aux devoirs de leurs enfants). De manière inductive, l’implication des parents dans l’école favorise une approche proactive plus globale de l’apprentissage scolaire et de l’éducation en général.

Les meilleures façons pour l’école de susciter l’engagement des parents et la collaboration entre l’école et la famille :

Le personnel scolaire peut obtenir plus facilement la contribution des parents au primaire en utilisant des moyens diversifiés ayant un impact sur la vie des enfants. Prendre soin des communications (claires et compréhensibles) avec les familles, se soucier des sujets qui les préoccupent comme la santé et la sécurité de leurs enfants, susciter la participation des parents à la vie de l’école, leur proposer des activités d’implication où ils se sentent à l’aise, obtenir la collaboration des ressources du milieu pour répondre aux besoins particuliers des familles et des enfants; Tous ces efforts conjugués aident à concrétiser l’engagement parental à l’école.

Valoriser le rôle parental, en tenant compte à la fois de leurs aspirations et de leurs besoins et habilités, est capital. Les parents sont soucieux du rendement scolaire de leur enfant et plusieurs désirent être davantage épaulés dans l’exercice de leur rôle. Un grand nombre d’entre eux se disent aussi démunis lorsqu’il s’agit de suivre les apprentissages réalisés en classe par leur enfant. Il n’est pas toujours simple, par exemple, de superviser adéquatement les devoirs de sciences et de mathématique. Le personnel scolaire ne saurait attendre des parents un accompagnement professionnel dans les apprentissages scolaires. Les parents doivent savoir qu’ils peuvent contribuer à la réussite de leur enfant en entretenant simplement des relations affectives positives et en assurant un accompagnement attentif à sa vie scolaire (par exemple, en mettant en place, à la maison, des conditions facilitantes à l’apprentissage des devoirs et des leçons).

Cette affirmation est d’autant plus vraie dans les milieux défavorisés, là où un certain nombre de parents sont peu ou pas scolarisés et doivent composer avec une série de difficultés liées à la pauvreté. Ces difficultés varient grandement selon que le milieu est urbain, rural, homogène ou hétérogène. Il est donc important que le milieu scolaire connaisse les familles et recherche avec elles des solutions adaptées à leurs réalités.

Plutôt que d’essayer de répondre seul aux besoins des familles et des jeunes, le personnel scolaire peut établir des partenariats avec son milieu. Il a avantage à connaître les ressources du milieu (entreprises, groupes communautaires, organisations internationales, communautés religieuses, etc.) qui peuvent contribuer au développement du plein potentiel des jeunes et des familles et au succès scolaire, à les faire connaître aux parents pour répondre aux besoins qu’ils expriment le plus fréquemment, et à mettre en relation les uns avec les autres pour partager leurs perceptions et de l’information. Ce faisant, le personnel scolaire favorise le sentiment d’appartenance des parents à une communauté éducative. De petites actions simultanées (préférables aux grands projets sporadiques) peuvent générer de grands bénéfices pour les enfants, particulièrement en milieu défavorisé, et contribuer à augmenter l’«empowerment» et la prise en charge par les familles de leur pouvoir d’agir.

Les domaines de collaboration entre la famille et l’école :

Quatre domaines de collaboration entre la famille et l’école sont privilégiés. Ce sont la communication entre l’école et la famille, l’exercice du rôle parental, la participation des parents à la vie de l’école et la collaboration avec la communauté pour répondre aux besoins des familles et des jeunes.

VOLET 1 : DIVERSIFIER ET FACILITER LA COMMUNICATION ENTRE LES PARENTS ET L’ÉCOLE :

Le volet 1 s’attache à la nécessité de mettre en place des moyens de communication efficaces et variés entre l’école et les familles pour tout ce qui concerne la vie des jeunes. Il touche les aspects de la qualité de l’accueil des parents dans l’école, la fréquence du contenu et des messages, pour n’en nommer que quelques-uns.

Le volet 1 est prioritaire car c’est en s’appuyant sur un véritable dialogue entre l’école eet les parents qu’il sera possible d’approfondir le rôle des parents, sa participation à la vie de l’école et la collaboration avec la communauté.

VOLET 2 : FACILITER L’EXERCICE DU RÔLE DE PARENT :

Le volet 2 concerne l’importance de bien informer les parents sur leur rôle et de leur permettre de partager leurs préoccupations sur divers aspects qui touchent la vie et le développement de leur enfant (ex : la communication parent-enfant, le bien-être en général, la santé, la sécurité des jeunes) et de les aider à exercer ce rôle.

VOLET 3 : ENCOURAGER LA PARTICIPATION DES PARENTS À LA VIE DE L’ÉCOLE :

Le volet 3 fait référence aux pratiques de l’école visant à faciliter la mobilisation et la participation des parents ou des groupes de parents (ex : assister à des activités ou événements organisés pour ou par leur enfant) dans différents types d’activités et de multiples façons.

VOLET 4 : COLLABORER PLUS ÉTROITEMENT AVEC LA COMMUNAUTÉ POUR RÉPONDRE AUX BESOINS DES FAMILLES ET DES APPRENANTS :

Le volet 4 touche les liens entre l’école et les autres groupes de la communauté. Il invite à répondre aux besoins des parents et des jeunes, en apprenant à connaître les autres partenaires de la collectivité (communautaires, institutionnels, culturels ou économiques, etc.) et en créant une collaboration avec eux, il encourage des actions signifiantes et mobilisatrices.

Des liens plus étroits avec les partenaires clés de la communauté contribuent à bâtir une vision cohérente des besoins du milieu et à mettre en place des solutions concertées qui peuvent avoir des retombées directes ou indirectes à la fois dans la classe, dans le milieu de vie des apprenants et de leur famille.

LE RAPPROCHEMENT ENTRE LA FAMILLE ET L’ÉCOLE EST POSSIBLE!!! Les multiples réussites auxquelles j’ai participé ou que j’ai eu l’occasion d’observer en plus de vingt-cinq années d’expertise en sont les preuves les plus significatives qui soient. Les solutions efficaces en matière de réussite de l’apprentissage scolaire sont celles qui agissent de manière simultanée en classe, dans l’école, dans la famille et dans la communauté. Lorsque les acteurs en contact avec les apprenants sont engagés et convaincus de l’importance déterminante du soutien à leur donner pour favoriser leur bien-être et leur réussite à l’école, le message reçu par eux est plus cohérent et, de ce fait, plus fort, plus efficace… en un mot, plus efficient.

Rubrique: Education
Auteur: Micheline Raymond | 34debussy@gmail.com
Date: 3 Aout 2009
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