Pourquoi existe-t-il un décalage économique entre Haïti et la République Dominicaine ? suite...de Mercier Joseph PIERRE| JobPaw.com

Pourquoi existe-t-il un décalage économique entre Haïti et la République Dominicaine ? suite...


Au cours de la précédente publication (Pourquoi existe-t-il un décalage économique entre Haïti et la République Dominicaine, Réf : Nouvelliste # 38051 du 17/04/09), nous avons identifié quatre principaux facteurs (qui se sont pas des causes) pouvant justifier le devancement économique de la République voisine par rapport à Haïti. Entre autres, à la fin de la publication, plusieurs questions ont été posées et laissées sans réponses afin d’aboutir à d’autres publications où il faudrait aborder, au cas par cas, les véritables causes.

En effet, en 2008, la République voisine a reçu 2.9 milliards USD (contre 0.15 pour Haïti) sous forme d’Investissement Directs Étrangers et, dans la présente publication, nous devons aborder ce premier constat sous l’interrogation suivante : ‘’Pourquoi la République voisine reçoit-elle plus d’Investissement Direct Étranger qu’Haïti ?’’

Cette première préoccupation nous oblige à identifier sept grandes causes que nous allons situer à travers des différences entres ces deux Républiques, en matière de (i) Bonne Gouvernance, (ii) Potentiel écologique, (iii) Perception de l’extérieur (iv) potentiel en Zones Franches, (v) Acquis de l’Histoire (vi) Sécurité foncière, et (vii) Régulation commerciale (Code d’Investissement). En reportant certains indicateurs (nombres d’entreprises crées ou fermées, couverture forestière, nombres de lois et décrets votés), nous ne ferons que dresser, expressément, les zones divergentes entre les deux partenaires et qui peuvent servir des points de rattrapage à l’un d’eux.

Différence en Bonne Gouvernance.

En identifiant la Bonne gouvernance comme premier repère, l’objectif est de montrer que, durant les deux dernières décennies, les deux états se sont positionnés différemment faces aux Investissements Directs Étrangers (I.D.E) par leurs choix de régimes politiques. Ainsi, en rapprochant ‘’bonne gouvernance aux I.D.E’’, nous voulons simplement insinuer que ceux-ci (IDE) sont intimement liés aux turpitudes politiques.

En fait, plusieurs études ont déjà validé la corrélation entre Bonne Gouvernance et Investissement Directs Etranger. Parmi celles-ci, on retient celle qui a été menée en 90 par la Foreign Investment Advisory Services (F.I.A.S). Elle a été réalisée sur une centaine de firmes asiatiques et a révélé que celles-ci sont principalement attirées par la stabilité économique et politique de la zone. Le second critère d’attraction est le ‘’système légal‘’. Cette enquête pourrait être menée dans la Caraïbe et nous essaierons de constituer, succinctement, les résultats.


En construisant l’inducteur ‘’régime politique/durée’’ pour les deux états en question, on conclura qu’en matière démocratique, leurs choix ont été plus que divergents sur la période allant de 1990 à 2008. En effet, en République voisine où le Mandat présidentiel dure quatre années et renouvelable (article # 49 de la Constitution du 25 Juillet 2002) : ces dix huit (18) années sont alternés en quatre mandats de quatre années et sont repartis entre 3 régimes présidentiels (un président a été élu à deux reprises).

Quant à Haïti où le Mandat présidentiel dure cinq années (article # 134-1) mais non renouvelable (article # 134-3 de la Constitution du 29 mars 1987), cet intervalle a été découpée en 9 régimes, allant de Gouvernement provisoire au Transitoire ; du ‘’de facto’’ au Conseil des Sages. Ensuite, un point statistique montre que la durée moyenne par mandat a été de 1.8 an (allant d’un seul Mandat complet à un Régime transitoire de 5 mois). Succinctement, on conclut que dans l’un des états: le cadrage ‘’Rigueur Constitutionnelle/Régime Politique’’ n’a pas été respecté alors que l’état voisin en fait un avantage comparatif afin de prospérer.

a. impact sur l’environnement économique
Au regard des prévisions des études de la ‘’F.I.A.S’’, cette divergence de bonne gouvernance ont influencé différemment les deux économies localisées de part et d’autre de l’ile. Ceci peut être observé, d’une part, par l’ouverture ou le rétrécissement des secteurs (effet taille) et, d’autre part, par leur mode de croissance (effet taux).

D’abord, en République voisine, de 1990 à 2007, le total des Zones franches est passé de 20 à 53 parques et selon le Rapport du Conseil National des Zones Frances d’Exportations (C.N.Z.F.E), celles-ci logeaient 526 entreprises en 2007. Entre 1990 à 2008, le potentiel de réception touristique a passé d’environ 20 à 66 milles chambres. En somme, entre 1990 à 2008, son PIB courant est passé de 9.5 à 45.7 milliards USD, soit une croissance d’environ 380%.

Ensuite, en Haïti, le potentiel de zones franches est passé de un (1) à deux (2) parques c’est à dire: SONAPI et la CODEVI. Toutefois, cette dernière est encore hors de l’autorité de la Direction des Zones Franches. Selon un rapport non officiel, le nombre d’entreprises dans le secteur textile a chuté de plus de 70% entre 1995 à 2008. D’ou une croissance moyenne, en fil de rasoir, d’environ 1.03% du PIB courant qui s’est soldé à 7.00 milliards USD en 2008. Ci-dessous, nous reportons la liste des zones franches qui ont été créées entre 1990 à 2007 dans les deux états :

Liste des zones franches créées entre 1990 à 2007 en Haïti et en République Dominicaine
Zones Franches en République Domincaibe Zones Franches en Haiti
Non +Date de création Non+Date de création
1. Hato Mayor 1990 1. Aucune 1990
2. La Armería 1990 2. Aucune 1990
3. Los Alcarrizos 1990 3. Aucune 1990
4. San Fco. de Macorís 1990 4. Aucune 1990
5. Cotuí 1990 5. Aucune 1990
6. Pedernales 1991 6. Aucune 1991
7. PISANO 1993 7. Aucune 1993
8. Gurabo 1993 8. Aucune 1993
9. Santiago-Licey 1993 9. Aucune 1993
10. Excel Boca Chica 1995 10. Aucune 1995
11. Navarrete 1996 11. Aucune 1996
12. Palmar Abajo 1996 12. Aucune 1996
13. Palmarejo 1997 13. Aucune 1997
14. Caribbean Ind. Park 1997 14. Aucune 1997
15. Laguna Prieta 997 15. Aucune 997
16. Tamboril 1997 16. Aucune 1997
17. Santiago-Jánico 1997 17. Aucune 1997
18. Bayaguana 1999 18. Aucune 1999
19. Salcedo 1999 19. Aucune 1999
20. El Seibo 2000 20. Aucune 2000
21. Los Mina 2000 21. Aucune 2000
22. Jaibón 2000 22. Aucune 2000
23. Hato Nuevo 2001 23. Aucune 2001
24. Cibernético 2001 24. Aucune 2001
25. Zona Franca Ind. Luna 2001 25. Aucune 2001
26. Quisqueya 2001 26. Aucune 2001
27. Multimodal Caucedo 2002 27. Aucune 2002
28. La Palma 2004 28. CODEVI 2004
29. Don Pedro 2004 29. Aucune 2004
30. Bella Vista 2004 30. Aucune 2004
31. El Limonal 2005 31. Aucune 2005
32. La Hispaniola 2005 32. Aucune 2005
33. Dos Rios 2006 33. Aucune 2006
34. Multiparques 2007 34. Aucune 2007
(Source: Conseil National des Zones Franches d’Exporatation – CNZFE / Statistiques 2007)

Imaginez une enquête de la F.I.A.S dans ces deux états et prévoyez la réponse des entreprises aux questions suivantes : Pourquoi vous choisissez d’investir dans cet état et non dans l’état voisin? Quels sont ses avantages comparatifs par rapport à l’état voisin ? Qu’est-ce qui vous poussera à investir dans l’état voisin ? Quelles sont vos recommandations aux autorités de l’état voisin ?


b. impact sur le renforcement institutionnel
En dehors des divergences en régime politique, la bonne gouvernance pourrait être validée aussi à travers les orientations qu’ont retenues ces deux partenaires, sur les plans économiques et commerciaux.

Pour Haïti, l’année 1991 a été le point de départ d’une reforme fiscale qui, malheureusement, a été interrompue l’année suivante. Ensuite, on peut évoquer la libération du système financier (du taux fixe au taux flottant sur : marché de change, des dépôts) entre 1995 à 1997 et le renforcement des procédures de préparation du budget (décret du 16 février 2005) qui ont largement influencé la finance publique. En fait, sur la période, une dizaine de Lois et Décrets ont été adoptés et ont, bon gré mal gré, contribué au renforcement institutionnel. Parmi ces dispositifs, on retient (i) la modernisation des Zones Franches (Loi du 2 août 2002) (ii) la révision du code d’investissement (septembre 2002) et (iii) la modernisation des entreprises publiques (décret de septembre 1996).

Quant à la République voisine, la reforme fiscale a été entamée tardivement par rapport à celle d’Haïti. Elle a été initiée en 1996 (Decreto No. 58-196) et a amené la création du Système Intégré de Gestion Financière (loi # 6-06). Toutefois, durant les deux décennies (1990 à 2008), elle s’est largement différenciée par un ensemble des dispositifs qu’on peut classer en quatre groupes :
Le Renforcement institutionnel : qui peut être expliqué par la couverture légale (lois, décrets, décrets-lois, résolutions, conventions) des organismes publics. En sus, plus d’une trentaine de lois et décrets ont été adoptées sur la Finance publique.

La Transparence institutionnelle : qui peut être validée par le fait que tous les organismes d’État ont une couverture numérique (site web) où sont reportés : sa mission, ses rapports annuels, les statistiques, les lois et décrets et personnes de contacts. Ensuite, la loi No 200-04, consacrant le libre accès aux informations publiques (Loi No. 200-04) confirme cette volonté de transparence.

Modernisation des Finances publiques : qui peut être expliquée par l’adoption de plus de 14 lois sur l’organisation du crédit public (dont la Loi de Crédit Public No.6-06 et la création du Conseil d’endettement public (Loi No. 87-2001).

Meilleur cadrage entre politique monétaire et budgétaire : qui peut être prouvé par le programme de recapitalisation de la banque centrale (Loi No. 167-07), par l’obligation faite à l’État de radier le déséquilibre budgétaire enregistré en cycle fiscal N-1 (Loi de Crédit public # No.6-06- et # 423 – 06) et par la mise en place d’un système de Programmation pluriannuelle du Budget.

En reportant les précédents dispositifs, l’objectif est de montrer qu’en République voisine le périmètre institutionnel s’est largement agrandi durant les deux décennies. Cet élargissement institutionnel peut être observé aussi par le renforcement des secteurs de soutien (services). En effet, plus de cinquante firmes d’Expertise comptable (dont : Price Waterhouse Coopers, Ernst & Young, KPMG) cohabitent le circuit financier. Ainsi, ne peut-on pas approuver qu’il y a une convergence entre I.D.E et renforcement du secteur de vérification dans cet état ?

Quant à Haïti, il importe de soulever le renforcement institutionnel autrement et, malencontreusement, par certaines interrogations telles : Que signifie les concepts ‘’Institution/bureaucratie/Gouvernance’’ dans l’imaginaire haïtien ? Face au vieillissement de la bureaucratie actuelle, comment prévoit-on celle de 2015 ; de 20 ? Comment la génération présente prévoit la gouvernance économique d’Haïti en 2015 ? Qui influencera les orientations économiques, budgétaires et économiques ? Où sont les blocages en Haïti ? Qui sont les plus capables? Bref : Qu’est-ce qui fait le sérieux d’un professionnel haïtien ?

Au reste, cette première démarche, basée sur une succincte comparaison de bonne gouvernance, semble insuffisante car certains états continuent de recevoir des IDE en plein instabilité politique,. Le décalage peut être expliqué par la Différence en Potentiel écologique’’. Nous allons évaluer la dotation et le positionnement écologiques des deux états (à suivre……)


NB : Le fichier (en format word) peut être obtenu de :
mercierjo@yahoo.fr, mercierjo@hotmail.com,


Rubrique: Economie
Auteur: Mercier Joseph PIERRE | mercierjo@yahoo.fr
Date: 30 Avril 2009
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