Investissement étranger et croissance économiquede Gassendy Calice| JobPaw.com

Investissement étranger et croissance économique


La faiblesse des investissements directs étrangers (IDE) ne concoure pas à réhausser le niveau de la croissance économique en Haiti. Les chiffres utilisés dans le travail pour la période 1980-2005 peuvent justifier ce constat. De ce fait, l'Etat haitien et le secteur privé doivent élargir les canaux par lesquels passent les IDE. Cet article présente quelques propositions permettant de contribuer à encourager l'IDE en Haiti si l'on veut améliorer la croissance économique.
Encourager l’Investissement Direct Etranger pour catalyser la croissance économique en Haïti

Haïti est un pays économiquement vierge et les ressources disponibles sont peu ou mal exploitées. De ce fait, les activités économiques appelées à développer le pays ou à favoriser la croissance ne sont pas organisées de manière cohérente et ne concourent pas à réduire la pauvreté ou à diminuer le taux de chômage. Les IDE peuvent être considérés comme des injections de capitaux pour relancer l’économie haïtienne.

A la fin du régime duvaliériste en février 1986, Haïti a connu des troubles politiques et économiques qui ont provoqué une forte instabilité dans le pays. Cette situation a suscité une méfiance auprès des investisseurs qui n’ont pas une image convaincue du système économique et qui ont peur d’investir leurs capitaux dans le pays. L’instabilité politique du pays et les contraintes juridico-structurelles contraignent à l’établissement des IDE en Haïti.

L’économie haïtienne a attiré quelques IDE dans les deux dernières décennies qui n’ont pas pu s’installer à long terme dans le pays. L’économie fait face à une situation de plus en plus chaotique ou alarmante (augmentation du taux de chômage, augmentation du seuil de pauvreté, etc.), le taux de croissance du PIB a diminué considérablement pour cette même période et la production totale des facteurs ne fait que chuter avec la faiblesse du capital physique et du capital humain.

Cependant, tout espoir n’est pas perdu, il est possible de réussir un investissement en Haïti et l’exemple de la Digicel peut récemment confirmer cette affirmation. Or, avant l’arrivée de la Digicel en Haïti, le marché des téléphones mobiles était très concentré et de type d’oligopole pur où les compagnies en place contrôlaient totalement le marché. Digicel a doublé sa part de marché en moins d’un an et ce marché n’est même pas en compétition. De ce fait, le pays a la capacité d’absorber des flux considérables d’IDE dans des secteurs clés de l’économie (télécommunications, infrastructures,…) ayant des effets positifs sur le marché des biens et services ; et l’état haïtien et les différents agents économiques supportent l’équivalent en contrepartie de ces investissements.

L’IDE a besoin de structures et de capacités nationales solides pour être un catalyseur de la compétitivité. Haïti n’échappe pas à cette exigence et la mise en place d’infrastructures de base est importante pour accompagner ces structures et pour attirer les investissements étrangers. La médiocrité des infrastructures en Haïti, dont les réseaux de télécommunications, est l’un des principaux obstacles à l’adoption du nouveau système de production de biens et services dans le pays. Le marché des biens et services, indispensable à la production nationale et à la croissance, fait appel à des structures stratégiques et préalables pour favoriser son élargissement et pour augmenter la capacité productive de l’économie haïtienne. La taille du marché des biens est l’un des facteurs économiques importants qui peuvent attirer des IDE dans un pays.
Des flux considérables d’investissements nationaux attirent les IDE et Haïti ne compte pas beaucoup d’entreprises ayant des capitaux importants sur le territoire national. Plusieurs facteurs sont à la base du problème d’attraction des IDE en Haïti dont quelques-uns sont les suivants :
- les faiblesses des infrastructures de transport et de communication;
- l’instabilité de l’environnement (sécurité, protection des droits de propriété);
- la pénurie de main-d’œuvre qualifiée.

Les problématiques portant sur les effets et déterminants des IDE sur le marché des biens et services et sur la croissance économique en Haïti sont complexes et nécessitent une analyse approfondie. L’un des problèmes le pus complexe qui décourage l’implantation des IDE en Haïti est la faiblesse assez générale des capitaux industriels nationaux. Les capitaux existants sont souvent issus de négoce (commerce), ils restent diversifiés, de petite taille et destinés à alimenter des réseaux commerciaux familiaux.

A.- Evolution des IDE et du taux de croissance du PIB

Le fait que le pays est politiquement instable, le climat n’est pas trop favorable pour attirer des flux importants d’IDE. De 13 millions de dollars en 1980, le volume des flux d’IDE est passé à 10 millions de dollars en 1988, deux ans après la chute du gouvernement de Jean Claude Duvalier, soit une diminution de 3 millions de dollars, pour devenir ensuite presque insignifiant en 1994 qui fut marqué par la pression de l’embargo sur Haïti. A cette époque, les investisseurs, inquiets de la situation politique du pays, ont dû rapatriés leurs capitaux. Les flux d’IDE ont augmenté en 1999 pour atteindre un montant record de 30 millions de dollars, ils ont fléchi considérablement en 2001 à 4 millions pour atteindre 10 millions en 2005. (BRH, rapports annuels 1980-2005)

Durant la période d’étude, le stock des flux d’IDE par rapport au PIB est insignifiant pour catalyser la croissance économique en Haïti.

Ainsi, de 1980 à 1994, le PIB est passé de 2,803.04 millions de dollars à 701.99 millions de dollars ; soit un taux de croissance négatif du PIB évalué à – 11.94%. Le taux de croissance du PIB augmente de 9.9% un an plus tard grâce à une amélioration du PIB pour fléchir ensuite à – 3.51% en 2004. Cette fluctuation du taux de croissance du PIB est dû à l’instabilité macroéconomique du pays. (cf. Graphique 1)

Graphique 1


B.- Indice d’instabilité macroéconomique et IDE

Pour relancer le cadre macroéconomique et catalyser la croissance économique, les autorités gouvernementales doivent concourir à la baisse relative de l’insécurité en Haïti. Plus la stabilité politique est durable, plus les investisseurs étrangers vont investir davantage dans le pays. La stabilité politique est alors une condition sine qua non pour attirer les IDE en Haïti.

L’indice d’instabilité macroéconomique est la moyenne arithmétique de l’indice dimensionnel du taux d’ouverture, de l’indice dimensionnel de la variation du taux de change et de l’indice dimensionnel de l’inflation. Cet indice mesure l’impact de la réponse aux perturbations sociopolitique et économique sur les agrégats macroéconomiques susceptibles de créer un climat favorable à l’investissement dans le pays. Il existe une relation inverse entre l’indice d’instabilité macroéconomique et le volume du flux d’IDE, quand celui-ci diminue le volume des flux d’IDE augmente et vice versa ; donc cet indice influe beaucoup sur la décision d’investir en Haïti. Plus cet indice augmente, plus le PIB réel s’écarte du PIB potentiel. Ainsi, de 31% en 1980, cet indice est passé à 13% en 1987 ; soit une nette amélioration au niveau de certaines variables macroéconomiques clées du pays. Ensuite, cet indice s’est progressivement augmenté pour atteindre 55% en 1992, un an après le coup d’état du président Aristide (1er mandat), et 50% en 1994 alors que les IDE ont chuté considérablement durant cette même période; pour atteindre un taux sans précédent de 90% en 2003 suite à de nombreuses perturbations politiques lors du second mandat du gouvernement Aristide et est passé à 56% en 2005 grâce à une amélioration des politiques gouvernementales.(cf. graphique 2)

Graphique 2
Evolution de l’indice d’instabilité macroéconomique par rapport à l’IDE, 1980-2005


C.- Flux des investissements nationaux par rapport aux IDE

Les investissements nationaux en Haïti se composent en investissements privés et investissements publics. Le secteur privé est, avec l’état, le principal moteur de la croissance. Il nourrit et stimule la croissance dès lors qu’un certain nombre de facteurs se conjuguent pour offrir un environnement propice à son expansion. L’investissement privé est une condition préalable indispensable à la croissance économique : il est en effet le moteur qui entraîne les rouages de la machine économique en permettant aux entrepreneurs de réunir les ressources nécessaires pour produire des biens et des services. Une croissance rapide et durable est favorisée par une conjonction favorable dans laquelle l’entrepreneuriat et l’investissement induisent une hausse de la productivité qui à son tour autorise un accroissement des investissements dans le futur. Cet enchaînement est également propice à la création d’emplois et à l’apparition de technologies nouvelles, en particulier grâce aux échanges et aux investissements internationaux. Ainsi, de 1980 à 1991, les investissements publics sont passés de 50.78 à 27.37 millions de dollars et les investissements privés de 411.25 à 365.39 ; ce retrait au niveau des investissements que connait le pays reflète la situation politique de l’époque. Cette baisse des investissements publics persiste pour descendre à 5 millions en 1994 et les investissements privés sont passés à 70.53 millions de dollars.

Depuis lors, de nombreux efforts se sont consentis et la situation économique s’est améliorée par rapport aux années antérieures. Ainsi, en 2003 et en 2004, les autorités gouvernementales ont augmenté le volume des investissements publics à 92.70 et 95.35 millions de dollars pour tenter une relance rapide des activités économiques suite aux troubles socio-politiques de l’époque ; alors que les investissements privés ont diminué considérablement pendant les deux années consécutives à 14.12 et 18.86 millions de dollars ainsi que l’IDE en 2004. Enfin, l’économie haïtienne a connu une légère reprise des investissements privés de 65.43 millions de dollars pour l’année 2005 et les IDE sont passés de 5.9 millions en 2004 à 10 millions en 2005, tandis que les investissements publics ont diminué de 48.55 millions au cours de cette même année. (cf. graphique 3)

Graphique 3


L’existence de marchés concurrentiels et développés est capitale car ceux-ci favorisent et récompensent l’innovation et la diversification, accélèrent l’entrée et la sortie des entreprises et contribuent à harmoniser les règles du jeu applicables à l’ensemble des acteurs du secteur privé. Les marchés jouent en outre un rôle essentiel en conférant au processus de croissance une assise sociale et géographique plus large qui ouvre aux plus démunis la perspective d’y prendre part et d’en tirer bénéfice. La mobilisation de l’investissement privé est donc appelée à gagner de l’importance tant pour la création d’emplois que pour l’accélération de la croissance ou la lutte contre la pauvreté. L’accroissement des capacités de production du secteur privé n’est pas le seul facteur qui compte pour la croissance économique, encore faut-il qu’il s’accompagne de gains de productivité résultant de la rationalisation et de la modernisation des moyens de production.

Conclusion

Pour attirer les IDE et catalyser la croissance économique Haïti doit renforcer, par le biais des autorités étatiques, ses résultats scolaires, sa gouvernance, ses infrastructures de base, et ses liens avec les potentiels investisseurs étrangers. De nombreux efforts sont lancés, mais ils sont loin de stabiliser le cadre macroéconomique et d’augmenter le volume des flux d’IDE en Haïti.

L’étude empirique du travail a donc montré qu’il n’est pas possible d’attirer les IDE en Haïti sans une stabilité macroéconomiques du pays.

Les IDE apparaissent comme une source qui peut alimenter la production de richesses, l’enrichissement du milieu d’implantation. Ce sont des capitaux, des connaissances, des capacités à produire de la valeur ajoutée valorisable sur le marché local et sur les marchés étrangers, ce sont des emplois qui seront rémunérés par cette valeur ajoutés, des impôts qui seront versés. Dans un contexte de mondialisation des marchés et de concurrence planétaire, si l’emploi et l’enrichissement ne sont pas suffisamment assurés pour le milieu local par les firmes d’origine locale, les pouvoirs publics en appellent à l’investissement étranger, c’est-a-dire de fait à des firmes internationales, même s’il leur parait plus convenable d’employer ce terme d’investissement étranger qui fait quelquefois oublier qu’on en appelle alors à une organisation internationale privée d’accumulation du capital qui poursuit très logiquement ses intérêts privatifs. Les pouvoirs publics locaux sont alors sont alors souvent des acteurs de l’investissement étranger dans le milieu local : ils apportent directement ou indirectement des ressources : terrains, aménagement, réduction d’impôts, formation de main-d’œuvre, voire prêts et même participation au capital.

La théorie économique veut que l’IDE permette aux entreprises (nationales) de gagner en efficacité et de contribuer à la performance économique d’Haïti à moyen et à long terme par l’amélioration qu’elles apportent aux réseaux d’échanges. L’analyse des tendances de l’IDE montre que les entreprises haïtiennes n’exportent pas beaucoup et se tournent de plus en plus vers la consommation locale, ce qui dénote une vitalité et une faible maturité accrues de leur part. Cela n’a rien de surprenant pour une économie ouverte, petite comme celle d’Haïti. Cette tendance est particulièrement évidente dans le secteur manufacturier.

La mise en place d’un ordre juridique équitable, d’un système judiciaire fonctionnel et d’un climat général de sécurité sont des conditions essentielles pour augmenter les flux d’IDE en Haïti afin de catalyser la croissance et de réduire la pauvreté.







Gassendy CALICE
DEA en Economie
Maitrise en Management
DES en Planification
Calice6@hotmail.com
38 71 21 62


Rubrique: Economie
Auteur: Gassendy Calice | calice6@hotmail.com
Date: 4 Dec 2008
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