Changements climatiques : de la nécessité de gérer l’inévitablede Ramon's Claude JEAN-PHILIPPE| JobPaw.com

Changements climatiques : de la nécessité de gérer l’inévitable


Les hommes pour subvenir à leurs différents besoins entreprennent des activités qui, in fine, créent des ponctions sur l’équilibre écologique et environnemental de la nature. Les effets se manifestent de diverses manières : déforestation, désertification, érosion, éboulements, inondations, tempêtes tropicales, cyclones, sécheresse bref des catastrophes naturelles. Les émissions de dioxyde de carbone (CO2), des hydrocarbures halogénées (CFC, HCFC, PFC) à partir des échappements des véhicules, des cheminées des usines et industries, le déboisement et le changement de vocation des sols affectent la concentration de la couche d’ozone dans l’atmosphère et participent aux changements du climat. L’une des plus grandes manifestations de ces derniers est le réchauffement global de la planète et ceci comporte d’innombrables impacts sur les écosystèmes, les établissements humains et les infrastructures physiques. D’où la nécessité et l’urgence d’adopter des mesures d’adaptation.
Les variations observées dans les caractéristiques du climat (augmentation de la température, variation des précipitations, vent, etc.) sont imputables à des causes d'origine naturelle (variation du soleil, volcans, etc.) et des causes d’origine anthropique (gaz à effet de serre, déboisement, agriculture, urbanisation). Toutefois, les experts ont développé des modèles mathématiques montrant que la variabilité naturelle est insignifiante par rapport aux activités humaines ayant des conséquences éprouvées sur les changements du climat. De nos jours le changement climatique engendré par l’homme entraînera une augmentation de température moyenne de la Planète de 1,5 à 6oC ; le niveau de la mer devrait s'élever de 15 à 95 cm d’ici 2100. Cette élévation s’intensifiera par la suite et pourrait même s'accélérer au cours du siècle suivant.

En Haïti, les prévisions ne sont pas moins alarmantes : augmentation de température allant de 0,8oC à 1,0oC et de 1.5o C à 1.7oC en 2030 et 2060 respectivement, diminution importante des précipitations en terme de volume (de -5,9% à –20% en 2030 et de –10,6% à –35,8% a l’horizon 2060), raréfaction des jours de pluie. Par ailleurs, les saisons semblent s’emmêler les unes avec les autres (saisons sèches plus longues, saisons de pluie plus courtes bien qu’avec des pluies plus intenses), mettant le paysan haïtien dans des difficultés à prendre des décisions rationnelles concernant son exploitation agricole tant qu’il perd totalement le contrôle de la nature. Sa survie s’en trouve donc menacée. Les changements climatiques sont plus qu’évidents et les conséquences sont gravissimes pour les écosystèmes. Les menaces se manifestent sous plusieurs formes : sécheresse, cyclones, inondations, glissement de terrain, éboulements, raz de marée, etc.

De l’imminence des dangers

Le changement climatique prévu devrait apporter un éventail de défis à Haïti, où le bien-être économique et social reste grandement tributaire de la prospérité et de la viabilité du secteur des ressources naturelles, notamment les ressources hydriques, forestières, halieutiques et agricoles.
Les modèles prévisionnels laissent croire que les plus grands défis seront liés à l'augmentation de la fréquence et de l'intensité des événements climatiques extrêmes tels que les inondations, les sécheresses et les tempêtes. En raison des événements extrêmes et de la rapidité du changement climatique, des seuils critiques pourraient être dépassés, ce qui entraînera des conséquences graves ou catastrophiques.
Il y a une question récurrente en ce qui a trait aux impacts et à l'adaptation liés au changement climatique : l'incertitude, que ce soit à l'égard des prévisions concernant le changement climatique (le degré et la vitesse du changement des températures, des précipitations et d'autres facteurs climatiques), à l'égard de la réaction des systèmes (connaissance partielle), à l'égard de la capacité d'adaptation des personnes. Compte tenu de la complexité de ces systèmes, l'incertitude est inévitable et particulièrement prononcée à l'échelle nationale, où de nombreuses décisions doivent être prises en matière d'adaptation. Néanmoins, il est possible d'affronter l'incertitude dans un contexte de gestion des risques, et d’ailleurs selon le principe de précaution rien ne doit nous empêcher de mettre en œuvre des mesures d'adaptation. « Dans le doute, abstiens-toi » dit le vieil adage. Le cout de l’inaction aurait des conséquences incalculables pour le pays.
Les Changements climatiques affectent donc plusieurs milieux, secteurs ou unités d’exposition comme : Agriculture, santé, la pêche, les ressources en eau, le système des transports, etc.

Les ressources hydriques

Les ressources en eau devraient rester parmi les axes prioritaires en ce qui a trait aux impacts et à l'adaptation liés aux changements climatiques en Haïti. Il est capital d'avoir un accès fiable à de l'eau propre (potable) pour l'usage domestique, la production alimentaire et énergétique et le maintien des écosystèmes naturels. Sous l’effet du déboisement, 25 des 30 bassins hydrographiques d’Haïti sont quasiment asséchés et vont présenter et présentent déjà en certains endroits des problèmes cruciaux d’accès à l’eau potable, ce qui par ricochet va avoir des impacts sur la situation sanitaire des populations exposées. Ces problèmes deviendront plus fréquents en raison de la variation du climat. La température et les précipitations ont des répercutions très importantes sur les cycles hydrologiques. Des changements dans ces paramètres, si minimes soient-ils, peuvent influer sur l'approvisionnement en eau en modifiant les régimes de ruissellement et d'évaporation ainsi que la quantité d'eau dans les rivières, les lacs, les étangs et les sols.

L’agriculture

L’agriculture participe aujourd’hui à environ 30% du Produit intérieur brut du pays. Plus de 65 % de la population active restent encore agricoles et environ 80 % de la population vivent directement de l’agriculture. Ce qui fait de ce secteur un maillon extrêmement important pour l'économie haïtienne. Toutefois, il ne faut pas perdre de vue que l’agriculture, en tant que secteur économique, est confrontée à des problèmes spécifiques de loin différents de ceux des autres secteurs. La production, par exemple, est intimement liée aux rythmes biologiques et aux contraintes géo climatiques. Elle pâtit des risques et incertitudes qui en découlent. Elle est donc naturellement sensible aux conditions climatiques. En Haïti, on s'attend à ce que le changement climatique ait des effets néfastes sur les cultures agricoles. Les températures plus chaudes nuiront les cultures végétales en raison du stress hydrique et des problèmes liés à l'eau (par exemple, les canaux d’irrigation recevront moins d’eau et de moindre qualité) et aux ravageurs (invasion d’espèces exotiques comme les récentes fourmis géantes dans la Grand’ Anse, le Plateau Central et le Nord-ouest). D’où il ressortira une baisse substantielle du niveau de productivité dans le secteur agricole. Comme il a été démontré plusieurs fois dans le passé, les événements extrêmes, qui sont difficilement prévisibles et pour lesquels il est difficile de se préparer, peuvent dévaster les exploitations agricoles. Ainsi, la sécheresse météorologique et hydrologique de plus de sept mois en 2005 dans le sud d’Haïti a gravement touché les exploitations agricoles de cette région, réduisant considérablement le rendement des cultures et de fait les moyens de subsistance des paysans et augmentant aussi la prolifération des insectes et des maladies.

Les forêts

La couverture végétale du pays serait à l’heure actuelle de moins de 1.5% du territoire national. Ce cas de figure ne peut que nous rappeler notre haut degré de vulnérabilité. C’est sans doute sans compter les services écologiques qu’offrent les systèmes ligneux que les paysans s’adonnent hélas à cette activité. Il faut surtout rappeler que les aires écologiques boisées participent à la régulation des régimes hydriques, de la température et du climat, conservent les sols, contrôlent l’érosion causée par la pluie et le vent, contrôlent la sédimentation des plans d’eau, protègent la biodiversité, fixent et emmagasinent le carbone (dégagé par les cheminées industrielles et les pompes d’échappement des automobiles), libèrent de l’oxygène, donc participent à la mitigation des désastres naturels. Avec la coupe effrénée des arbres, tous ces bénéfices écologiques se sont réduits considérablement et les nouvelles conditions du régime climatique viendront alourdir le bilan, en ayant un impact certain sur ce qui reste d’espaces boisés en Haïti. De simples petits changements dans les températures et les précipitations influeront grandement sur la croissance et la survie des forêts. Les feux de forets seront beaucoup plus fréquents et la productivité de ces écosystèmes serait aussi affectée.

A suivre ...
Le Matin
15 juillet 2009

Par Ramon's Claude Jean-Philippe,
M.Sc. en Economie de l’Environnement et des Ressources Naturelles
Professeur d’Economie agraire au CTPEA
Spécialiste en Conception, Suivi et Evaluation de Projets
jpram28@yahoo.fr


Rubrique: Economie
Auteur: Ramon's Claude JEAN-PHILIPPE | jpram28@yahoo.fr
Date: 22 Juil 2009
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